A la Casse n°64, le mondial de la démol des navires

23 nov. 2021

A la Casse n°64
Bulletin d’information et d’analyses sur la démolition des navires
Juillet-août-septembre 2021
85 pages, 102 sources, 302 photos (+ 3 cartes), 16,1 Mo
https://robindesbois.org/wp-content/uploads/a_la_casse_64.pdf

Sallie Knutsen, Alang © Eren Topcu

Le business reprend. Le prix d’achat moyen par les chantiers du sous-continent indien atteint les 600 US$ la tonne contre 350 US$ en 2020 à la même époque.

149 navires sur 178 ont été démolis dans le sous-continent indien, 12 en Turquie et 7 dans des chantiers de l’Union Européenne dont 6 étaient assignés à l’offshore pétrolier en mer du Nord.

55 des navires à démolir avaient été construits dans l’Union Européenne, en Norvège et au Royaume-Uni.

En fin de vie, les supertankers Hapon et Peron ont rapporté chacun à leur propriétaire 28 millions de dollars. Leur sistership EM Vitality s’était vendu en mai 2021 24 millions de dollars. Dans cette année 2021 marquée par la reprise “quoiqu’il en coûte” du commerce international, plus les armateurs, courtiers et cash buyers diffèrent la mise à la casse, plus ils gagnent d’argent. Plusieurs navires dont 4 tankers, un vraquier et un paquebot annoncés à la vente au cours du 2ème trimestre et du 3ème trimestre de l’année 2021 et considérés par les bases de données officielles comme étant “à démolir” n’ont pas rejoint les chantiers de démolition. Ils sont en attente dans des ports sur l’océan mondial. Le Phoenix I, un vraquier de 269 m, d’un poids lège de 17.724 tonnes dont la vente avait été contractualisée en juillet sur la base de 552 US$ par tonne est même redevenu “en service”. Il se vendra au minimum cet hiver 600 US$ par tonne, soit une plus-value de 850.000 US$.

Le pétrole et le gaz sont dans le brouillard. 54% des navires envoyés à la casse pendant les mois de juillet-août-septembre 2021 étaient liés à l’industrie offshore et au transport des hydrocarbures; ils représentent 74% du tonnage. Un navire de forage, le NS Cassino est parti à la casse avant même d’être exploité.

Les porte-conteneurs désertent les chantiers de démolition. Après la saignée des années 2012-2013 et 2016-2017, les chargeurs s’arrachent ceux qui restent sur le marché. Entre le 1er juillet et le 30 septembre 2021, sur les 178 navires partis à la casse, 2 seulement étaient des porte-conteneurs.

60 navires ont arboré un pavillon corbillard pour leur dernier voyage. Les plus utilisés sont Saint-Kitts-et-Nevis, les Comores, le Gabon, la Mongolie, Palaos et la Sierra Leone.

“A la Casse” est le reflet du monde avec ses magouilles et ses violations des droits de l’Homme.
L’ex-paquebot Albatros appartenait à l’armateur allemand Bernhard Schulte Cruise Services GmbH & Co KG. Par un coup de billard à trois bandes, il s’est débarrassé de son poids mort sans avoir à respecter la règlementation européenne. L’Albatros devenu le Tros est en cours de démolition dans un chantier d’Alang.
Le plus vieux navire de ce trimestre est aussi le plus scandaleux. L’ex-Risa Paula construit en 1962 aux Pays-Bas est devenu au fil des siècles le Blissful Reefer, pavillon Cameroun pour son dernier voyage vers le Bangladesh. En 2015, le Blissful Reefer sous pavillon Honduras avait été arraisonné par la Papouasie-Nouvelle-Guinée. Selon l’Office International des Migrations, son armateur thaïlandais spécialisé dans la pêche et le transport de poisson était complice d’un vaste réseau de trafic d’êtres humains recrutés au Cambodge, en Birmanie et au Laos et employés comme forçats à bord de ses galères.

Dans le secteur militaire, l’Allemagne et l’Italie alimentent les chantiers turcs d’Aliaga avec d’ex-navires de surface et même le Bagnolini, un vieux sous-marin qui était à l’abandon dans la baie d’Augusta en Sicile.
Le porte-avions NAel Sao Paulo ex-Foch, sistership du Clemenceau, est toujours en attente de remorquage vers Aliaga.
La Marine Nationale française poursuit ses efforts pour démanteler ses ex-navires en France dans des chantiers agréés par l’Union Européenne. Le chantier Gardet & De Bezenac au Havre a hérité du surnommé Minirem, un objet flottant non identifié. Cet ex-chaland de servitude nucléaire a longtemps servi de réceptacle des eaux de refroidissement des sous-marins à propulsion nucléaire pendant leur maintenance sur l’Île-Longue dans la rade de Brest. Il allait ensuite les déverser du côté d’Ouessant. Après avoir rendu ces services en Bretagne, il a été transféré dans le port militaire (et nucléaire) de Toulon. Robin des Bois recommande la plus grande prudence pendant le démantèlement du Minirem et la mise à l’écart du recyclage de certaines de ses ferrailles. Son histoire est à lire p. 11.

 

 

 

 

 

Imprimer cet article Imprimer cet article