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Affaires Maritimes ou business

Le journal national Aujourd’hui évoquait samedi 28 mai la prochaine vente aux enchères du Médocain. Citant un bateau en parfait état dont plusieurs milliers de touristes et autres usagers gardent un souvenir tendre, le journal précisait -seule information vraie- que le Médocain a été construit en 1968.

Le Médocain, construit donc en 1968 par les ateliers et chantiers de France-Gironde était conçu en tant que bac pour le passage d’eau entre Royan et la Pointe de Grave. Sa capacité initiale était de 266 places. Son armateur était le Conseil Général de Gironde jusqu’en mai 2004 où il a été vendu dans des conditions inconnues à la division “transport fluvial” d’un transporteur routier, Bull Services, installé à Villenave d’Ornon.

A l’occasion de sa vente, le Médocain est qualifié de transbordeur en eaux côtières et de car-ferry; un ratissage large qui permet d’appâter les exploitants de bateaux à passagers dans les pays où les niveaux de sécurité maritime sont faibles et souvent victimes de catastrophes maritimes à répétition, notamment l’Afrique, le Moyen Orient, l’Europe Orientale, l’Asie (voir liste attachée à notre courrier au Secrétaire d’Etat à la mer en date du 23 mai 2005).

Le Médocain, battant à ce jour le pavillon français, peut donc être acheté par n’importe qui et remorqué et exploité n’importe où. Les Affaires Maritimes de Bordeaux en conviennent, même si elles en sont navrées. La capacité du Médocain est aujourd’hui fixée à 500 passagers. En fait “d’état parfait”, sa conception archaïque, son pont supérieur, ses moteurs d’origine à la maintenance improbable, en font un candidat logique à un suicide collectif à base de surcharge et de pannes, un Joola bis (1800 morts au Sénégal), ou plus près de chez nous un Saint-Philibert bis (450 victimes en 1931), surchargé, égaré dans l’embouchure de la Loire, certifié par Véritas et naufragé. Le Saint-Philibert, quelques mois après la tragédie, a été renfloué et réutilisé après arasement de ses superstructures comme transporteur de sable jusqu’en 1979 entre Morlaix et Saint-Malo.

Mais le Médocain, lui, est revendu en tant que navire à passagers. Au nom de la libéralité du commerce, il n’est soi-disant pas possible de restreindre sa revente à la démolition ou à son installation sur un rond-point ou un quai. Le Ministère des Transports n’a pas répondu aux sollicitations de Robin des Bois en date du 23 mai. La sortie de flotte pour les vieux pétroliers, tout le monde s’y accorde, mais pour les navires à passagers il n’y a rien à faire. Il est vrai que lorsqu’un pétrolier coule, la cargaison coûte cher, et les indemnités aussi sur le littoral européen et américain, tandis que lorsqu’un transbordeur à passagers coule sur le Congo, la cargaison n’a pas grande valeur. Quant aux responsabilités des vendeurs, elles sont totalement dégagées puisque l’adjudicataire de la vente signera une “prise de possession” du Médocain le rendant immédiatement responsable “de toutes manoeuvres effectuées”.