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Bilan mondial 2007 des navires partis à la démolition

Pour la 2ème année consécutive, l’association Robin des Bois a étudié en détail la réalité du marché. La mobilisation et l’analyse d’une trentaine de sources bibliographiques diverses et spécialisées ont permis d’établir un inventaire des navires voués à la démolition en 2007. En 2006, Robin des Bois avait comptabilisé 293 navires vendus pour la démolition. En 2007, nous en avons comptabilisé 288. Si cette baisse en nombre de navires démolis est légère (-2%), elle est plus sensible en ce qui concerne le poids total des métaux recyclés : 1,7 million de tonnes en 2007 contre 1,9 million en 2006 (-10%). La situation diffère cependant selon la catégorie de navires considérée : le nombre de tankers (pétroliers, chimiquiers, transporteurs de gaz) démantelés en 2007 a augmenté de près de 30 % comparé à 2006, alors que celui des vraquiers et autres transporteurs de marchandises a diminué de près de 40 % ; l’âge moyen des pétroliers partis à la casse est de 29 ans, l’âge moyen de l’ensemble des navires de 31 ans, l’âge moyen des vraquiers de 34 ans.

Sur ces 288 navires, 95 (33 %) étaient sous pavillon européen ou appartenaient à des armateurs établis dans l’Union Européenne ou dans l’Association Européenne de Libre Echange (AELE) ou des principautés comme Monaco. Aucune des transactions internationales liant ces armateurs européens à des chantiers de démolition extra-européens n’a été précédée d’un désamiantage. Le Secrétariat de la Convention de Bâle n’a pas répondu à notre courrier en date du 4 décembre 2007 lui demandant de nous préciser le nombre et le nom des navires ayant fait l’objet de notifications relatives à l’exportation de déchets telles qu’elles sont mises en œuvre dans le cadre de la Convention. Le statut juridique de déchets attaché à un navire en fin de vie reste une théorie. L’Inde veut se positionner comme la nouvelle destination de « démantèlement responsable à prix attractifs » avec la décision à l’automne de la Cour Suprême d’exiger une dépollution préalable des navires avant démantèlement. Cette nouvelle règle du jeu n’a pas ralenti le rythme des arrivées mais les procédures d’autorisation ultimes de démolition sont plus longues. Après une période d’adaptation des propriétaires de navires, des agences d’Etat et des responsables des chantiers, le démantèlement a repris. Une délégation de l’OMI à Alang a approuvé en janvier 2008 cette possible reprise en main des pratiques de démantèlement. Selon la Cour Suprême, les brûlages à l’air libre sont désormais interdits à Alang.

Les tarifs offerts par les démolisseurs indiens et surtout bangladais ont connu une hausse régulière jusqu’à l’automne. Le record de l’année a été atteint par les chimiquiers Acrux et Pradera achetés par l’Inde 1250 $ la tonne à cause de la présence d’inox. D’autres facteurs comme la présence de quantités importantes de carburant dans les soutes du navire peuvent contribuer à des prix plus élevés que la moyenne. Les tarifs ont atteint jusqu’à 600 $ la tonne à l’automne au Bangladesh, aboutissant à la création d’un cartel des chantiers souhaitant imposer une baisse des prix. Le cartel a bloqué tout achat de navires au Bangladesh durant la fin de l’année. Cette action a entraîné une baisse sensible fin 2007 (moins de 500 $ la tonne).

En 2007, l’Inde et le Bangladesh ont reçu 81% des navires partis à la démolition. Suite à l’absence du Bangladesh sur le marché pendant 3 mois, l’Inde se classe première destination avec 129 navires (45%), devant le Bangladesh 105 navires (36%) ; en tonnage de métaux à recycler, le classement est inversé avec plus de 720.000 t pour le Bangladesh et 630.000 t pour l’Inde. Les autres navires ont terminé leur vie au Pakistan (23), en Chine (6), en Turquie (6), en Lettonie (5), aux Etats-Unis (4), au Canada (1) ; 9 destinations demeurent inconnues.

L’âge s’échelonne de 18 à 63 ans. La taille des navires démolis en 2007 est inférieure comparée à celle des navires démolis en 2006 : 164 ont une taille inférieure à 150 m, 89 mesurent entre 150 et 199 m, et 35 plus de 200 m ; le plus gros navire parti à la casse cette année est le Magnolia, un ancien VLCC (Very Large Crude Carrier) Mobil de 340 m de longueur.

En 2007, la catégorie des tankers, chimiquiers et transporteurs de gaz est la première parmi tous les navires partis pour la démolition avec 136 navires (soit 47% contre 37 %), suivie de celle des vraquiers et transporteurs de marchandises diverses (65 navires soit 23%) ; 26 gros navires de pêche ou navires usines ont été démantelés dont 6 pris en flagrant délit de pêche illégale ainsi que 19 navires à passagers dont 17 âgés de plus de 31 ans.

Sur les 288 navires partis à la casse en 2007, 118 ont été dans les années antérieures détenus avec leurs équipages dans les ports mondiaux et en particulier en Europe pour non-conformité aux règles de sécurité internationales dont 16 tankers inscrits par l’Agence Européenne de Sécurité Maritime sur la liste des navires simple coque ayant interdiction de transporter du fuel lourd depuis 2005 dans le cadre du paquet Erika I.

En Europe, des points positifs ont été observés en 2007 : feu vert pour le traitement des “ghost ships” de l’US Navy arrivés à Hartlepool au nord de l’Angleterre en 2003 ; ferraillage de la proue du MSC Napoli à Belfast en Irlande du Nord ; traitement annoncé du Fearless, un ancien transport de chalands de débarquement anglais, dans les chantiers Galloo du port belge de Gand, exceptionnellement précédé d’un accord entre les deux pays dans le cadre de la Convention de Bâle.

Enfin, le dock flottant du port du Havre a été mis en vente par les Domaines le 13 décembre 2007 mais les résultats de la consultation ne sont pas encore connus et des industriels français pourraient avoir fait une offre dans le but d’utiliser cet équipement rare et providentiel aux fins de déconstruction des navires.

 

Recueil “A la Casse” 2007 [1]