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Le MSC Meraviglia ou le pourisme de masse

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« S’il y avait une première folie à penser qu’une création de l’être humain était inaccessible à toute forme de destruction, il y en avait une seconde a en être persuadé au point de ne même pas prévoir une solution de secours en cas de catastrophe. », Pierre Bayard. « Le Titanic fera naufrage », Editions de Minuit, octobre 2016.

Les méga paquebots comme le MSC Meraviglia sont les cauchemars des préfets maritimes et des sauveteurs en mer. 7 à 8000 personnes à évacuer en cas de collision, d’incendie, d’attentat ou de naufrage en haute mer et de nuit, c’est une mission impossible. Les armateurs n’osent même pas répéter l’exercice dans une baie abritée et ensoleillée. En juillet et en septembre 2016, 2 exercices d’évacuation réservés aux membres d’équipage à bord du Norwegian Breakaway et du Harmony of the Seas se sont soldés par les chutes brutales des canots de sauvetage. Bilan total : 2 morts et 7 blessés.

Dans l’Atlantique et la Méditerranée, la puissance et le nombre des remorqueurs sont insuffisants pour assurer en sécurité le sauvetage des « Gigantic » en difficulté.

« Préparez-vous à vivre quelque chose d’exceptionnel », dit le croisiériste MSC dans son pitch de lancement du MSC Meraviglia en citant Sophia Loren, Patrick Bruel, Gad Elmaleh.

Mais ne vous préparez pas au pire!

Le MSC Meraviglia est un VRP du tourisme global. Le capitaine est italien. L’équipage est multinational, pour l’essentiel asiatique. En bas, tout en bas, ils dorment peu dans des cellules qui ne sont jamais exhibées. Le pavillon est maltais. Le propriétaire italo-suisse cultive le secret. Ses bilans annuels ne sont pas publiés. Le chiffre d’affaire serait de 25 milliards d’US$. Le 2ème transporteur maritime mondial exploite environ 450 porte-conteneurs. En fin de vie, il les casse à Alang (Inde) ou exceptionnellement au Bangladesh, au Pakistan ou en Chine. « A la Casse », le bulletin trimestriel de Robin des Bois sur la démolition des navires, recense le ferraillage de 96 porte-conteneurs MSC depuis 2006. Seul le MSC Napoli échoué sur les côtes anglaises en janvier 2007 après une amorce de rupture dans la Manche a été, en 2 parties, démantelé en Europe dans la cale sèche du chantier Harland & Wolff à Belfast, Irlande du Nord. Le MSC Napoli était affrété par MSC à une société domiciliée aux îles Vierges britanniques.

Comme tous les « Gigantic », le MSC Meraviglia enlaidit et pollue les villes d’escale et rentre par effraction et par dragages intensifs dans des petits ports et des îles effrayées. Miroir de la géopolitique du monde, le rayon de nuisances de ces barres flottantes tend à diminuer. Les petits tours du MSC Meraviglia en Méditerranée se cantonnent prudemment à des navettes Marseille, Gênes, Barcelone avec juste une petite pointe vers Messine pour éviter les migrants en Méditerranée et les risques d’attentats dans le Maghreb.

MSC a compris qu’avec ce clinquant et cette opulence de bazar, mieux vaut éviter d’aller chez les autres et préférer rester chez soi. Pour ses « Gigantic » en opération aux Etats-Unis d’Amérique, la compagnie vient de louer pour 100 ans une petite île des Caraïbes, un MSC Land qui accueillera dès l’année prochaine ses clients « en toute sécurité » lors d’une escale exclusive.

[1]Action de Robin des Bois sur l’île de Giglio (Italie), avril 2012
© Photo Robin des Bois

Voir aussi
Dossier sur les navires de croisière [2] de Robin des Bois
Bulletins « A la Casse » [3] sur la démolition des navires