Le voyage en solitaire du Modern Express

1 févr. 2016

Le scenario du navire qui ne veut pas couler est un cas d’école connu des sauveteurs en mer et des préfectures maritimes depuis la dérive du Liberty ship Flying Enterprise dans la Mer de la Manche en hiver 1952. Une différence notable avec le Modern Express est que le commandant était resté à bord jusqu’au bout avant d’être évacué après 15 jours de dérive et de vains efforts pour remettre en équilibre le navire.

Bien qu’il soit relativement récent, il a été constaté sur le Modern Express dans le port d’Anvers de multiples défaillances depuis 2012.

Le Modern Express est à la dérive depuis 7 jours. L’impuissance des moyens franco-espagnols renforcés par la compétence hollandaise à capturer le navire démontre une fois de plus le sous-dimensionnement des moyens d’intervention. Le Golfe de Gascogne est fréquenté par des porte-conteneurs, des cargos ou des navires de croisière deux fois plus long.

L’inventaire des produits toxiques et des cargaisons embarqués n’est pas connu avec précision. Le nombre et le gabarit des « engins de travaux publics » sont inconnus, ils contiennent chacun des hydrocarbures et autres fluides toxiques pour l’environnement marin qui s’ajoutent au fuel de propulsion du navire estimé à 300 t. Les informations sur le bois exotique du Gabon sont imprécises : une fois la préfecture de Brest parle de bois débité, une autre fois elle parle de grumes. Une vingtaine de fûts sont stockés en pontée. Robin des Bois souhaite la publication intégrale de l’inventaire des cargaisons.

Si le Modern Express, seul maître à bord après Dieu, s’échoue de lui-même, il s’arrêtera en travers à quelques centaines de mètres des plages, ce qui compliquera davantage son allégement en vue d’un très hypothétique renflouement. Dans certains cas certes plus favorables, des navires analogues ont été avec succès tirés de leur position délicate. C’est le cas des Hoegh Osaka et Cougar Ace.

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Hoegh Osaka échoué près de Southampton, Royaume-Uni, janvier 2015
© UK Marine Accident Investigation Branch
Cougar Ace, Iles aléoutiennes, juillet 2006.
© Kevin Wing

 

Le démantèlement in situ du Modern Express après son éventuel échouement serait beaucoup plus complexe que ceux du porte-conteneurs Rokia Delmas sur l’Ile de Ré en 2006, du TK Bremen en 2012 à Erdeven dans le Morbihan ou du Luno à Anglet dans les Pyrénées Atlantiques en 2014. Les plages et les dunes côtières des Landes seraient exposées à des arrivées ponctuelles d’hydrocarbures et de débris imposant la mise en œuvre immédiate du Plan Polmar et l’établissement d’un large périmètre de sécurité empêchant le piétinement du cordon dunaire par la foule des curieux.

Si le navire est pris en remorque reste l’énigme de sa trajectoire. Aucun port de refuge ou place de refuge n’est à cette heure connu. L’Espagne en accueillant le Modern Express dans les rades ou dans les rias de Bilbao ou de Santander aurait là une magnifique occasion de faire oublier le massacre du Prestige et son remorquage forcené vers l’Atlantique Sud. Dans un plan d’eau abrité, le redressement du Modern Express pourrait être sérieusement envisagé.

 

 

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