Mergitur

10 juin 2016

Qui lut crue dans les documents préparatoires du Grand Paris ? Qui lut crue dans le dossier d’aménagement des berges de la Seine du Petit Paris ? Les élus unis veulent une Seine canalisée, colonisée qui ferme son clapet. Ils veulent faire du système Seine une zone d’expansion des activités humaines alors que le fleuve a besoin d’une zone d’expansion des crues.
En Ile-de-France, les élus, les préfets, les services continuent à penser et à dire comme en 1920-1950 : les crues de la Seine sont lentes. La décrue sera lente. Les crues diluent les pollutions. Les crues sont en hiver. Les ruptures de barrage sont mises à l’écart.
Des milliers d’entités franciliennes accordent dans l’anarchie des permis de construire, d’imperméabiliser, de défricher, de recouvrir, de remembrer et d’année en année elles élargissent le périmètre des zones inondables.
La demande de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle formulée alors que la pluie tombe encore et acceptée en catastrophe par les gouvernements est une catastrophe écologique. Cette procédure d’exception inventée en 1982 est devenue automatique. Elle incite les collectivités à recommencer comme si de rien n’était. Elles se posent en victimes de la catastrophe alors que pour la plupart, elles en sont les complices.

Dans le bassin de la Seine, 145 sites industriels fermés ou en activité sont des sources de PCB. Tous les cours d’eau de Seine-et-Marne et de l’Essonne et la Seine elle-même en sont imprégnés. La crue a lessivé les sols et remobilisé les sédiments pollués. La contamination des poissons va s’aggraver, non seulement dans le bassin de la Seine mais aussi dans la baie de Seine.

Dans l’ensemble des communes reconnues en état de catastrophe naturelle dans le bassin de la Seine, il y a 176 sites inscrits dans l’inventaire BASOL des sites pollués. La plupart sont au bord de l’eau. Il s’agit par exemple de décharges, d’anciennes usines à gaz, d’ex sites de fabrication de produits phytosanitaires.
Dans l’Essonne 2 des sites sont mythiques ; les 2 étaient exploités par des faux éliminateurs de déchets qui les enfouissaient sur place. A Ballancourt, il subsiste sur une île au milieu de la rivière Essonne 8 tonnes de PCB et 500 t d’hydrocarbures. Le site est fermé depuis 1992 et n’a pas été entièrement évacué pour des raisons financières. A Sermaise, au bord de l’Orge, autre affluent de la Seine, 2000 fûts sont encore enfouis dans les sols. Les eaux souterraines sont polluées par des HAP, des solvants chlorés, des PCB.

Les berges de la Seine sont des poubelles. Suite au signalement de Robin des Bois, une de ces poubelles d’hydrocarbures et de plastiques a été évacuée par le port autonome de Paris quelques semaines avant l’inondation ; elle était sur le territoire d’Athis-Mons (1). De telles décharges le long de la Seine, il y en a des dizaines.

La Seine est une et indivisible. Les déchets, visibles et invisibles, bactériologiques, toxiques, les plastiques et sacs poubelles vont s’échouer dans ses méandres entre Rouen et le Havre et s’accumuler dans la Manche et les chaînes alimentaires.

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Crue et décrue (photos Robin des Bois – 3 juin et 8 juin 2016)

 

(1) Voir le reportage photo de Robin des Bois et l’intervention du Port Autonome de Paris.

 

 

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