Depuis 2003 et l’affaire du Clemenceau, l’opinion publique et les dirigeants politiques réclament de la part de la France une initiative sur le démantèlement des navires. Malgré des engagements du Grenelle de l’Environnement et du Grenelle de la Mer, ces revendications sont restées lettre morte. Le dernier non évènement en date est la « mission parlementaire démantèlement des navires » qui renvoie à un nouveau comité de pilotage et affirme grâce à un raisonnement simplificateur qu’une filière de démantèlement des navires en France n’aurait pas en elle-même de viabilité économique [« Lorsqu’on sait qu’un gros broyeur peut traiter 1.000 t de ferraille par jour, on ne peut que réaliser que les 10.000 t actuelles de navires militaires ne représenteraient que 10 jours d’activité » ]. La Mission ne s’attarde pas sur les scandales environnementaux, sanitaires et sociaux du ferraillage des navires dans les pays asiatiques.
Pour autant deux navires de commerce français sont désarmés et sur le marché de la démolition après des tentatives infructueuses de vente pour exploitation. Ils appartiennent à Seafrance, filiale de la SNCF, actuellement en redressement judiciaire : il s’agit des Seafrance Renoir et Seafrance Cezanne. Leur revente pour démolition en Inde ou un autre pays asiatique assureraient une recette d’au moins 6 millions d’euros et pourrait contribuer dans une certaine mesure à un futur retour à l’équilibre d’exploitation ou faciliter la revente de Seafrance – SNCF à un de ces concurrents. Ces « avantages » économiques se feraient au détriment de l’environnement, de la santé des travailleurs et du critère de responsabilité. Un armateur français institutionnel doit traiter en Europe du Nord des navires hors d’usage recelant des quantités importantes d’amiante et battant pavillon français.
Le Seafrance Renoir et le Seafrance Cezanne rouillent à Dunkerque depuis leur cessation d’activité en 2009 ; échapperont-ils aux affligeants feuilletons de ces car ferries européens finalement admis à la démolition au Pakistan ou en Inde après avoir été rachetés par des armateurs factices ? (voir sur le site de Robin des Bois le bulletin A la casse.com n°19 et le feuilleton de l’Onyx, de la Finlande aux plages du Pakistan). Ils sont la preuve qu’une filière de démolition en France et en Europe du Nord est utile et indispensable. Le Seafrance Renoir pourrait être détruit et recyclé là où il a été construit au Havre par les ex-chantiers ACH. 29 années après, le chantier de construction navale est fermé mais l’entreprise Gardet et de Bezenac dispose sur le même site d’une autorisation réglementaire de déconstruction des navires. Une autre solution de proximité pourrait être le chantier Van Heyghen Recycling à Gand.
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