(30 juillet 2020)
Nous, fous des falaises, des criques, des grèves,
peintres des vagues, des brouillards, des horizons sombres, radieux, illuminés,
sous la neige, sous la pluie, sous les arcs-en-ciel, sous l’étonnement des pêcheurs et des ramasseurs d’algues,
sommes consternés de savoir nos sujets émerveillés aujourd’hui présents dans les musées du monde entier sous la menace de l’industrie éolienne démesurément verticale et dévoreuse de fonds, fâcheuse et faucheuse de la mer et de nos rêves.
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Communiqué de Robin des Bois
Le syndrome de la massification et de l’économie d’échelle a encore frappé. Après l’A380, les méga-navires de croisière, l’EPR, c’est au tour des boniventeurs de l’éolien d’embarquer l’Etat, les élus, les médias et même les écologistes dans une aventure ruineuse et dégradante pour l’environnement. Robin des Bois est opposé à l’industrialisation et à la vente à la découpe de la mer dans sa surface et dans ses profondeurs.
Après l’étalement urbain, c’est l’étalement marin pour le made in offshore de l’électricité. De l’île d’Yeu aux bancs de sable de Dunkerque, à minima 500 km2 de ciel et de sous-sols marins vont être poignardés par des machines à peine mises au point par une inédite alliance hispano-germanique (Gamesa + Siemens) et un fantôme américain (General Electric). Toutes la même ambition : toujours plus haut, plus lourd et plus productif. Un seul défaut générique exposera toute la lignée à des réparations interminables et prohibitives.
Alors qu’EDF ruinée par le nucléaire reconnaît un endettement colossal, EDF Renouvelables passe commande de 71 éoliennes à Gamesa-Siemens pour le projet au large de Fécamp. L’investissement de 2 milliards d’euros est financé en majorité par une « dette sans recours », c’est-à-dire que la responsabilité financière de la maison-mère EDF ne pourra pas être recherchée si des difficultés de remboursement surviennent. Pour le projet de Saint-Brieuc, intégralement entre les mains de l’énergéticien espagnol Iberdrola depuis mars 2020, 62 éoliennes ont aussi été commandées à Gamesa-Siemens. Ces commandes de turbines-guillotines qui culminent comme la tour Montparnasse à 200 m de hauteur (59 étages) mettent en situation de monopole des fabricants étrangers et gèle les innovations voire les ruptures technologiques qui permettraient de couper définitivement le 21ème siècle des moulins à vent du 12ème siècle.
La prétendue filière de l’éolien offshore français est en fait aux mains d’industriels espagnols, allemands, américains escortés par des sous-traitants et des fournisseurs danois, hollandais, belges, canadiens et chinois. Cette course multinationale au gigantisme est soumise aux risques de débâcles financières et techniques. L’effondrement en mai 2020 à Rostock pendant les tests de levage d’une grue Liebherr fixée sur l’Orion 1, un navire chinois spécialement construit pour installer les fondations d’éoliennes, est symbolique de la fragilité de toute la chaîne. L’attelage de la grue HLC 295000 et de l’Orion 1 devait installer les monopieux de fondation sur le parc éolien de Saint-Nazaire.
Au regard de la sécurité maritime, la localisation des projets est pré-catastrophique. A quels répartiteurs d’activités, à quels géomètres du cadastre des vagues et des tempêtes, à quels martiens doit-on le positionnement de 80 éoliennes en approche du chenal d’accès du port de Nantes-Donges-Montoir-Saint-Nazaire, plus gros importateur français de gaz liquéfié, ou celui de 64 éoliennes dans la baie de Seine à côté d’une zone refuge où 50 à 60 navires de commerce jettent l’ancre avant et pendant les tempêtes ?
Le rapport décennal 2009-2019 sur le suivi des parcs éoliens belges exprime de fortes réserves sur le fameux et trompeur « effet récif » des parcs éoliens au bénéfice des espèces benthiques. Il constate qu’autour des parcs éoliens belges les captures de soles restent stables tout en ajoutant que ce maintien résulte sans doute de l’emploi concomitant de chaluts de pêche électrique ! Le rapport n’aborde pas faute d’information la mortalité directe des oiseaux migrateurs mais constate que les écosystèmes de l’industrie éolienne repoussent les fous de Bassan, les macareux, les guillemots et les pingouins torda, allongent leur parcours, pénalisent leur quête alimentaire et entraînent une perte énergétique susceptible de nuire à leur capacité de résilience et de reproduction. Le rapport belge constate aussi que les fondations des éoliennes font un raffut du diable pendant leur mise en place et tuent immédiatement ou par des effets secondaires les marsouins, la plus petite et la plus vulnérable des espèces de cétacés.
Il est par ailleurs reconnu que les pollutions acoustiques sous-marines provoquées par les fondations et l’élévation des éoliennes nuisent aux planctons, aux larves de poissons et aux chaînes alimentaires marines. Pour le moment, les effets nocifs des vibrations et infrasons sous-marins en période d’exploitation sont sortis des radars.
Les effets cumulés des usines éoliennes offshore de la façade Atlantique sur la biodiversité, les activités de pêche professionnelle et sur la sécurité alimentaire n’ont pas été étudiés.
L’éolien offshore bénéficie déjà d’un régime juridique d’exception. Par décret du 8 janvier 2016, les délais de recours contre les autorisations d’implantation en mer de zones industrielles éoliennes sont réduits à 4 mois et la cour administrative d’appel de Nantes est compétente en premier ressort. Aujourd’hui, EDF et le lobby de l’éolien veulent museler davantage les opposants et réclament au nom de la simplification que le Conseil d’État soit compétent en premier et dernier ressort. EDF essaiera-t-elle dans la foulée d’obtenir le même passe-droit pour ses futurs réacteurs nucléaires ?
Les communiqués, commentaires aux enquêtes publiques, contribution au débat public et tribune de Robin des Bois sur l’éolien offshore sont visibles ici :https://robindesbois.org/category/balisage/exploitation-et-industrialisation-de-la-mer/usines-offshore/
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