A l’occasion des dragages en cours dans la baie de La Rochelle et de l’immersion des boues de dragages sur le site de dépôt sous-marin du Lavardin utilisé depuis 1968, il est constaté que le paramètre radioactif n’est pas pris en compte; les études entreprises autour des années 1990 en vue de définir l’empreinte de l’usine de traitement des terres rares aujourd’hui exploitée par Rhodia sont abandonnées malgré les recommandations unanimes des experts. Amorties par des interprétations optimistes et politiquement correctes, elles témoignaient d’un marquage significatif des sédiments de la baie et des moules, y compris au pied de la tour Richelieu dans le chenal d’accès au port de La Rochelle (66 Bq / kg de matière sèche pour le radium 228 selon l’Institut de Physique Nucléaire de Lyon). D’après le laboratoire du CEA dont les résultats sont moins pénalisants que ceux de l’IPNL, les teneurs en thorium sont 70 à 130 fois supérieures aux teneurs naturelles moyennes des sédiments marins littoraux jusqu’à 100 m de l’émissaire du rejet en baie de La Rochelle et de 8 à 20 fois supérieures jusqu’à 500 m.
L’activité des sédiments marins côtiers en Bretagne est de l’ordre de 30 Bq / kg pour le thorium 232. Le substrat géologique est granitique. Bien que le substrat géologique en Charente-Maritime soit calcaire et non éruptif, les sédiments de l’Anse de l’Aiguillon à 15 km au nord de La Rochelle et de Fouras à 18 km au sud ont au moins la même teneur en thorium que les sédiments bretons.
La régie du port de plaisance de la Rochelle est autorisée à draguer dans ses ports, bassins et chenaux d’accès 185.000 m3 par an. Les opérations moyennes annuelles sont de 100.000 m3 par an. Elles sont mal planifiées. Le pétitionnaire n’a toujours pas soumis de mode de gestion des boues de dragage à extraire du petit bassin à flot et de l’ancien bassin des chalutiers. Sans doute espère-t-il pratiquer l’immersion malgré les contaminations très fortes en métaux lourds et polluants organiques. Alors qu’il est d’usage de terminer en mars-avril les opérations de dragage sur le littoral atlantique afin de réduire l’impact sanitaire estival sur les usages d’agrément du littoral, un dragage ponctuel mal programmé a eu lieu du 4 au 27 mai 2005 dans les chenaux d’accès du port de La Rochelle et celui du Port Neuf où les concentrations en thorium 232 et ses descendants sont fortes.
La réglementation française recommande d’analyser la radioactivité quand le périmètre des dragages est susceptible d’être sous l’influence d’une source de radioactivité. Tout le monde sait à La Rochelle et bien au-delà que l’usine de traitement des terres rares, en activité depuis 1947 sous des tutelles différentes dont la plus connue est celle de Rhône-Poulenc, a déversé jusqu’en 1993 plusieurs curies par an de substances radioactives dans la baie. Réduits, les rejets continuent; l’arrêté préfectoral en vigueur continue de son côté à autoriser le rejet annuel de 1 curie* de thorium et de 3 curies de radium dans l’éventualité où les approvisionnements de terres rares pré-traitées en provenance de Chine viendraient à être coupés. Le thorium 232 perd la moitié de sa radioactivité en 14 milliards d’années. Il est connu comme étant parmi les plus toxiques des radioéléments.
Le remue-vases perpétuel auxquels se livrent les plaisanciers de La Rochelle génère un risque sanitaire pour les populations humaines et pour l’environnement marin. La contribution du site de dépôt sous-marin du Lavardin à la contamination chimique, bactériologique et radioactive de l’environnement marin et du littoral, dont l’Île de Ré, est très mal appréciée ou pas du tout.
L’association Robin des Bois demande donc au Préfet Maritime de Brest et au Préfet de Charente-Maritime d’imposer des analyses de radioactivité avant toute nouvelle opération de dragage dans la baie de La Rochelle de même que sur le site sous-marin du Lavardin et autour avant tout nouveau clapage. En plus de l’évaluation des risques pour l’environnement charentais, les informations recueillies permettraient à la France d’être en conformité avec ses obligations internationales. La Convention OSPAR relative à la protection de l’Atlantique du Nord-Est impose à ses signataires de rapporter tous rejets et immersions de substances radioactives.
Tout cela est de la radioactivité naturelle, diront sans doute de bonnes âmes. Les concentrations ne le sont pas.
* 1 curie = 37 milliards de becquerels
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