Le 25 septembre 2000, Bouygues Construction crie victoire. Par le biais de sa filiale Brezillon, le leader mondial des BTP vient d’emporter le marché du traitement des 200.000 tonnes des déchets d’hydrocarbures, déversés sur 450 km de littoral breton et vendéen par la perte totale de l’Erika.
La solution Brezillon a été choisie par Total après un appel d’offres international, parmi 10 autres options. Il s’agit pour résumer du criblage des déchets, de leur fluidification au gasoil et de leur lavage à l’eau. En fin de cycle, le sable dépollué et ne contenant pas plus de 2500 mg/kg d’hydrocarbures doit être revendu à des chantiers de travaux publics de proximité, hors des périmètres hydrogéologiques sensibles.
En septembre 2000, il était prévu que le traitement des déchets de l’Erika commence en décembre. Pour raccourcir la procédure administrative et commencer le traitement dans les meilleurs délais, Total a convaincu le Ministère de l’Environnement et les services de l’Etat de ne pas imposer d’enquête publique relative au traitement de ces déchets et à l’impact sur l’environnement de l’ensemble des opérations de dépollution. Ce vide juridique fondé sur une argutie de droit – les déchets ne proviennent pas d’une installation classée pour la protection de l’environnement, ils proviennent d’un navire – a cependant été comblé et encadré par un arrêté préfectoral et la constitution d’une Commission Locale d’Information et de Surveillance dont Robin des Bois et le Collectif anti-marées noires de Saint-Nazaire sont membres.
Il s’avère aujourd’hui que les premiers essais réalisés avec des déchets de l’Erika sont médiocres. L’extraction des matériaux mélangés au moment de la collecte et figés par un an et demi de stockage pose plus de problèmes que prévus par les concepteurs du projet. Les différents équipements de la filière de traitement sont exposés à des colmatages et bourrages. Le gasoil ne parvient pas à fluidifier les déchets, sauf en surface. Alors que le traitement doit atteindre 80 à 100 tonnes/heures, les résultats de la première phase des essais aboutissent à un taux de 8 à 12 tonnes/heures. Le sable résiduel est gras, noirâtre, avec une forte odeur de gasoil et contient jusqu’à 15.000 mg/kg d’hydrocarbures.
Si ces résultats et ces difficultés persistent, le traitement durerait bien plus longtemps que les deux ans annoncés. Il pourrait aussi être interrompu si le sable après lavage dépassait le seuil maximal admissible pour la valorisation en travaux publics. Selon Total, qui a la responsabilité de l’élimination des déchets de l’Erika, les essais n’ont pas encore commencé. Selon nos informations, 50 tonnes ont été traitées, sur un volume global estimé aujourd’hui à environ 270.000 tonnes.
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