Note d’information n°8
Les baleines devant la Cour Internationale de Justice
La Haye, Pays-Bas, audiences du 15 et 16 juillet 2013.
Pendant ces 3 semaines de débat au Peace Palace de La Haye, Pays-Bas, l’histoire et l’avenir de la chasse baleinière ont été passés en revue. Le 16 juillet dans ses dernières dépositions, le Japon laisse entendre qu’une décision de la Cour en faveur de l’Australie serait par lui ressentie comme un coup de force. « Ca serait obliger un Etat à se plier à une décision inacceptable ». Dans ce registre le Japon met encore une fois en avant que s’il a accepté le moratoire de 1982, c’était bien dans la perspective de sa révision. Si le Japon s’aperçoit un beau matin que les règles de la CBI sont modifiées, il serait obligé de claquer la porte.
Les propos du Japon à la fin du procès sont exactement les mêmes qu’à l’ouverture. « Pacta sunt servanda ». Les accords doivent être respectés. La bonne foi est de rigueur dans la conduite des traités. La Convention telle qu’elle est interprétée par l’Australie et la Nouvelle-Zélande n’est pas celle que le Japon a signée. Pour le Japon, l’objet de la Commission Baleinière n’est pas le maintien et la reconstitution des stocks de baleines. Le véritable objet de la Commission est de réglementer la chasse à la baleine.
Le Japon note que le refrain des baleines mis en musique par l’Australie a changé dans la deuxième phase du procès. L’Australie s’est mise à reprocher au Japon de ne pas respecter le cadre des permis de chasse scientifique tel qu’il est défini par la CBI. Le Japon relève à son sens une contradiction. Comment l’Australie peut-elle dans le même procès d’une part accuser le Japon de pratiquer une chasse commerciale en Antarctique et d’autre part l’accuser de ne pas respecter à la lettre les modalités encadrant la chasse scientifique ? Il faut que l’Australie choisisse.
Le Japon s’emploie à faire la distinction entre la chasse commerciale et la chasse scientifique. Il rappelle que les navires de recherche ne consacrent pas tout leur temps à la chasse à la baleine et que les routes des navires scientifiques sont dans le domaine public et sont disponibles sur le site Internet de l’Institute of Cetacean Research. Au sujet de la vente de la viande de baleine pour la consommation humaine et animale, le Japon rappelle qu’elle n’est pas illégale et qu’elle n’est pas l’unique motivation du programme scientifique JARPA. Sur la question de savoir si JARPA peut ou non être qualifié de programme scientifique, le Japon ne considère pas qu’il est de la compétence de la Cour internationale d’en décider. Selon le professeur Alain Pellet, « nous ne sommes pas là pour mener comme au Moyen-Age une Inquisition ». Les ambitions scientifiques de JARPA sont claires : « réduire les incertitudes scientifiques et préparer le terrain à la reprise de la chasse commerciale ». Les programmes JARPA ont comblé des lacunes sur la compréhension de la structure des stocks de baleines, sur la dynamique des populations. Ces informations ne pouvaient être obtenues que par des recherches létales.
Certes le Japon admet que de temps à autre ses protocoles scientifiques ont été présentés à la CBI avec un peu de retard mais en aucune manière ceci ne peut être assimilé à un geste de mauvaise foi. A contrario, c’est bien de bonne foi qu’il s’agit quand le Japon a renoncé à capturer des baleines à bosse ou à réduire les captures programmées de rorqual commun et ceci par souci de prendre en compte les recommandations des autre Etats membres de la CBI.
Le Japon a aussi tenu à préciser que depuis sa déclaration devant la Cour selon laquelle il ne portait pas dans son cœur les méthodes statistiques mises en œuvre, le professeur norvégien Walløe a approfondi ses connaissances à ce sujet et qu’il y souscrit à présent au moins partiellement.
Le Japon ne change pas un iota à sa doctrine, se présente comme la victime d’un complot ourdi par l’Australie et s’aventure à prédire que l’Australie et les autres pays défavorables à la chasse à la baleine provoqueront par leur intransigeance une scission qui aboutira à deux CBI, l’une pro-chasse, l’autre anti-chasse.
L’argument amiral du Japon reste que la Cour Internationale de Justice n’est pas compétente en la matière et à ce sujet l’argumentation sur la délimitation des frontières maritimes et des revendications australiennes en haute-mer est à nouveau déroulée.
En conclusion, le Japon rappelle à la Cour que le programme scientifique JARPA II sera réexaminé au prochain Comité Scientifique de la CBI. Au demeurant, cette expérience judiciaire de trois semaines est positive. Elle a selon le Japon permis d’exposer au monde entier le contenu authentique de sa chasse baleinière scientifique.
Robin des Bois voit dans cette ultime remarque du Japon une reconnaissance de l’insuffisance des publications.
La décision de la Cour Internationale de Justice est espérée avant la prochaine Commission Baleinière Internationale en été 2014.
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