400.000 tonnes de pneus usagés sont sous-produits annuellement par les consommateurs de bitume, soit 60 millions de pneus. Au moins 30 millions sont rejetés chaque année vers des destinations inconnues. Les pneus morts sont aujourd’hui en situation de saturation. Selon une étude réalisée en France par les Eco-maires auprès de 600 de leurs adhérents, 20 % des communes ont des problèmes liés au stockage et à la gestion des pneus usagés abandonnés sur leur territoire et dans les déchetteries.
Depuis 1991, la Communauté Européenne considère que les pneus usagés sont un flux prioritaire de déchets, et que la filière de récupération, de recyclage ou de valorisation doit être mise sur pied.
Le premier projet de décret relatif à l’élimination des pneumatiques usagés en France date de 1994.
En 2002, les pneus usés roulent de plus belle dans les décharges, les carrières et dans les pays d’Afrique où ils contribuent à l’insécurité routière. Des magmas de pneus envahis par les ronces se coulent dans le paysage. Ils attirent les moustiques vecteurs de maladies infectieuses, les rats et les serpents, et constituent à l’orée des villages et en lisière de forêts et des habitats pavillonnaires des îlots de risques et d’insalubrité. Depuis l’incendie d’Hagersville dans la province de l’Ontario au Canada en 1990, tous les spécialistes savent que la combustion d’un massif de pneus génère des dépenses colossales (en l’occurrence 1 million de dollars US), et une pollution atmosphérique et des eaux souterraines à base d’hydrocarbures, de fumerolles métalliques, de dioxines, de phénols, de benzène et de soufre.
En France, un inventaire des sites à risques est en cours de réalisation. L’Ademe (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie), recense 120 points noirs de pneus répartis sur l’ensemble du territoire en milieu rural ou urbain comme ” la grande centrale tropicale ” de Monnerville près d’Etampes dans l’Essonne, le stock de pneus dans le centre de Provins en Seine-et-Marne, la montagne de Neufmaisons en Meurthe-et-Moselle qui est à l’aplomb d’une canalisation de gaz, le massif de Plouray dans le Morbihan, et la débandade de Cugnaux, à côté de Toulouse, à 3 km d’AZF. La région Midi-Pyrénées s’est en effet laissée embarquer en 1996 dans un projet fumeux de transformation par cryogènie de 15.000 tonnes/an de pneus en poudrette de caoutchouc qu’une société canadienne Animat aurait dû acheter pour produire des tapis de sols pour animaux. L’usine n’est jamais arrivée, à la différence des pneus usagés qui prolifèrent en Haute-Garonne et dans le Tarn. À Artaix, en Saône-et-Loire, la combustion de 7 millions de pneus en cours depuis le début de l’année est circonscrite mais pas encore maîtrisée.
Le dernier projet de décret a été validé par le Conseil d’Etat. Il devait paraître en 2000. Des phases supplémentaires de consultation sont menées par le nouveau gouvernement. Dans son état initial, il implique les distributeurs, concessionnaires automobiles, les communes, les collecteurs et les industries de recyclage et de valorisation. Après la parution du décret, au moins 2 ans seraient nécessaires pour que la filière soit opérationnelle et transparente à tous les niveaux. Il resterait à être vigilant sur les valorisations douteuses comme les exportations de pneus dangereux, les utilisations en génie civil dans des pays sans génie civil, les récifs artificiels, le brûlage ou ” le comblement de parcelles ” déjà évoqué par le ministère de l’Ecologie lors du colloque sur le recyclage des pneumatiques usagés en septembre 2002.
Imprimer cet article