A Marseille, l’usine METALEUROP de l’Estaque a fabriqué jusqu’en février 2001 du trioxyde d’arsenic par grillage de déchets arséniés. Ce site industriel est installé sur des plates-formes superposées en terrain calcaire et fissuré, facilitant la migration des polluants à travers la falaise. L’impact de ces pollutions historiques doit être pris en compte dans le projet de remise en circulation d’eau du tunnel du Rove, visant à resaliniser l’étang de Berre. Le site des usines de Riaux, à l’Estaque, a aussi été exploité par ATOFINA. Le coût global de la dépollution des usines et du confinement sur site de 400.000 m3 de déchets était initialement estimé à 18,5 millions d’euros. Les travaux ont deux ans et demi de retard. Ils représentent pour METALEUROP, copropriétaire du site, un enjeu important si l’emprise peut faire l’objet d’une valorisation immobilière.
Le port de la Lave et l’anse de l’Estaque sont lourdement contaminés par l’arsenic et les métaux lourds (plomb, mercure, cadmium, zinc) qui ont ruisselé avec les eaux de pluie le long de la falaise depuis l’usine METALEUROP et se sont également infitrés par les failles du massif calcaire. Les analyses effectuées par le Port Autonome de Marseille (PAM) sont catastrophiques: les sédiments du port contiennent en moyenne 1852 mg d’arsenic par kilo de vase, 872 mg de plomb, 26,5 mg de mercure, 11,3 mg de cadmium, 921 mg de zinc. Ces concentrations représentent pour l’arsenic 37 fois le seuil d’alerte (50 mg/kg) défini pour les boues de dragage par l’arrêté interministériel du 14 juin 2000. Pour le plomb et le cadmium, ce seuil est dépassé de 4 fois, pour le mercure de 33 fois, pour le zinc de près du double. En prenant comme référence les valeurs de constat d’impact pour les sols pollués, la teneur en arsenic des vases du port de la Lave dépasse de 15 fois la norme pour un usage non-sensible, de 50 fois pour un usage sensible. Localement la contamination est encore plus forte, car les résultats d’analyses du PAM sont des moyennes établies sur cinq points de prélèvement.
Ces chiffres alarmants ne révèlent pas tout de l’héritage laissé aux Marseillais, à la Ville et au Port Autonome par METALEUROP. Le PAM n’a pas réalisé d’analyses des sédiments dans le port de la Corbière, mitoyen du port de la Lave, et dont les plages familiales sont très fréquentées dès le printemps. La remobilisation des vases par les bateaux de plaisance jetant et relevant l’ancre dans le port de la Lave, et par les baigneurs des plages de Corbière, remet en suspension dans l’eau les éléments toxiques, assurant leur dispersion dans l’anse de l’Estaque et leur disponibilité pour les organismes marins.
Les retombées atmosphériques des fumées de l’usine, jusqu’en 2001, ont contaminé l’environnement, les immeubles et les maisons du quartier de l’Estaque. Même désaffecté, le site de METALEUROP continue à diffuser ses poussières toxiques transportées par le vent à partir des tas de scories et de cendres pas encore confinés. L’auréole de cette pollution et son intensité ne sont pas évaluées par les services de la Ville ou l’Etat. Quant à l’eau douce, la nappe phréatique est également polluée. Elle est en relation avec les eaux marines, contribuant au transfert des polluants vers le port.
Robin des Bois constate que Marseille, comme Noyelles-Godault, est dépositaire et victime des pollutions générées par METALEUROP. L’arsenic, le plomb, le cadmium, le zinc en sont la signature caractéristique. Le confinement sur site des déchets internes à l’usine ne résoudra pas les problèmes. METALEUROP a contaminé les sols et le bâti du quartier de l’Estaque, l’eau douce de la nappe phréatique, les sédiments du port. En l’état actuel de la législation, toutes ces pollutions sont à la charge des propriétaires privés, de la Ville, et du Port Autonome de Marseille.
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