Bulletin « A la Casse » n°32

9 août 2013

Le 32ème bulletin d’information et d’analyses sur la démolition des navires est publié (75 pages). Il couvre les mois de mai, juin et juillet 2013. En 8 années, A la Casse est devenu un document de référence dans le monde entier. Des correspondants réguliers ou occasionnels font parvenir à Robin des Bois des informations ou des photographies.

Dans les 3 derniers mois, 271 navires sont partis à la démolition. Ils cumulent plus de 2,2 millions de tonnes de métaux. 106 (39%) étaient construits en Europe, 88 (32% appartenaient à des armateurs européens, 241 (89%) sont partis en Asie.

Le marché chinois connaît un sérieux passage à vide. La déferlante des navires de commerce retirés de l’exploitation vers l’Inde, le Pakistan, le Bangladesh, se maintient à son plus haut niveau. L’Inde, le Pakistan, le Bangladesh n’interdisent pas l’usage de l’amiante et n’ont pas d’installations dédiées pour le traitement des PCB (PolyChloroBiphényle). Les PCB et l’amiante font partie des déchets dangereux du démantèlement des navires.

La Turquie se spécialise dans les navires militaires, les car-ferries et les navires de croisière comme l’ex-Pacific Princess. Elle est notamment chargée de la démolition du porte-avions Ark Royal de la Royal Navy. Sans désamiantage préalable, l’Ark Royal a été vendu à un chantier d’Aliaga, pour plus de 3 millions d’euros. Dans les chantiers d’Aliaga, les navires sont échoués sur « la plage », c’est le cas de l’ex-Ile de Beauté de la Société Nationale Corse-Méditerranée qui est en cours de démolition. L’Ile de Beauté battait pavillon français. Le Beau est arrivé en Turquie sous le pavillon de Panama. Jusqu’au bout la SNCM a menti et prétendu que le car-ferry continuerait à être exploité en Turquie.

 L’ex-Ile de Beauté échoué à Aliaga (Turquie), 11 juillet 2013 © Dunkan

Pour rester dans le domaine réservé des marines militaires, la Marine Nationale démantèle sur dock flottant dans la rade de Toulon des vieilles unités non remorquables. La Marine Italienne s’apprête à faire des efforts dans la baie d’Augusta en Sicile.

L’Espagne envisage aux Canaries et au large de Valence de contourner l’interdiction d’immersion des vieux navires entrée en vigueur à la fin de l’année 2004 avec des projets de récifs artificiels censés développer le tourisme.

Au Maroc, une filiale d’Arcelor Mittal s’intéresse aux métaux des navires en fin de vie. Elle s’est fait la main sur l’ex-Styval, un cargo réfrigéré habitué aux quais de Concarneau. D’après les informations disponibles, le navire a été démoli en cale sèche.

Le Canada persiste à expédier dans des conditions aventureuses des vétérans à démolir au Mexique et en Turquie.

Les navires sous-normes pris dans la toile d’araignée des contrôles dans les ports sont poussés vers la sortie de flotte. La Palme d’Or depuis le 1er numéro d’A la Casse revient au Serine, construit en Allemagne en 1972 et détenu 19 fois dans les ports américains et européens avant d’être démoli au mois de mai en Inde.

Les équipages abandonnés par les armateurs sur des navires voués à la démolition sont parfois exposés à des risques physiques et psychologiques difficilement concevables pour qui ne s’intéresse pas aux conditions de travail en mer. C’est le cas à bord de l’Iron Monger 3.

Le contexte juridique ne pousse pas les armateurs à bousculer leurs habitudes. Seule la Norvège a ratifié la Convention de Hong-Kong pour le recyclage sûr et écologiquement rationnel des navires. La Convention n’interdit pas la pratique du beaching, c’est à dire l’échouage des navires sur les plages.

L’Union Européenne se signale elle aussi par une force d’inertie machiavélique. L’art de faire du surplace ou de la marche arrière en faisant semblant d’avancer. Le Parlement Européen a courageusement approuvé une disposition visant à bannir la pratique de l’échouage des navires battant pavillon de l’Union Européenne dans les pays non membres de l’OCDE comme l’Inde, le Pakistan et le Bangladesh. Or, les armateurs européens, comme leurs confrères américains, canadiens ou même asiatiques n’hésitent pas à transférer sous les pavillons de Saint-Kitts-et-Nevis, du Togo, de Tuvalu, ou des Comores les navires voués à la démolition. Le dépavillonage fait partie de l’arsenal juridique et économique du dernier voyage.

Au fil des 75 pages, on notera l’arrivée au Pakistan d’une drague de diamants en provenance d’Afrique du Sud et la fin simultanée de l’ex-European Gateway et de l’ex-Speedlink Vanguard. Ces deux navires étaient entrés en collision dans la Manche le 19 décembre 1982. Renfloué deux mois plus tard, l’European Gateway a été remis en état pour un long service avant de rendre les armes en Turquie cet été. L’autre navire impliqué est lui aussi en cours de démolition en Turquie.

Lien vers le 32ème bulletin d’A la Casse (pdf de 75 pages – 9 Mo)

 

 

 

 

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