Boues rouges : un mal mondial

3 oct. 2011

MAL – Magyar Alumínium ZRt (Aluminium Hongrois Co.) – vient d’être condamné à 470 millions d’euros d’amende pour le déversement de plus de 1,8 million de tonnes de boues rouges, un an après la rupture de la digue ouest du réservoir de l’usine d’Ajka en Hongrie. Selon le bilan officiel de la Direction Nationale des Catastrophes (Országos Katasztrófavédelmi Föigazgatóság) en date du 17 septembre 2011, un peu plus d’un million de tonnes de terres et matériaux pollués par les boues rouges aurait été collecté et regroupé. Il reste encore beaucoup de polluants dans la nature et ils ne seront jamais récupérés, dilués dans les sols, partis dans les eaux souterraines, transportés par le vent sous forme de poussières, et charriés par le Danube (1). Une équipe universitaire hongroise vient de publier une étude selon laquelle le plancton du Danube au niveau de Budapest a considérablement décliné pendant au moins 3 semaines après la catastrophe. Des peupliers ont été replantés sur les terrains agricoles qui ne peuvent plus être utilisés pour les cultures. Les peupliers ont des capacités de transfert des polluants dans leurs parties aériennes. Ils peuvent devenir des maillons de contamination des chaînes alimentaires pour la biodiversité ordinaire – oiseaux, insectes, vers de terre.

Le gouvernement hongrois prétend que tout est clos et que la seule priorité est de redonner à la région sinistrée sa vitalité économique. M. Janez Potocnik, commissaire européen à l’environnement a rappelé dans un discours prononcé à Budapest en mai dernier que ces catastrophes exigent un suivi sur le long terme. Il a souligné que la Hongrie, présidente de l’Union Européenne pour les 6 premiers mois de l’année, avait mal interprété la Directive concernant la gestion des déchets de l’industrie extractive. En effet, dans un premier temps, la Hongrie a exclu les réservoirs de boues rouges de son périmètre. Elle a également estimé à tort que les boues rouges n’étaient pas des déchets dangereux.

Le stockage des boues rouges pose des problèmes de sécurité publique et environnementaux dans le monde entier. 70 millions de tonnes de boues rouges sont produites chaque année dans le monde.
En Hongrie encore, le stockage des boues rouges de Tata à Almásfüzito est implanté sur les bords du Danube et est exposé aux crues. Les écoulements et infiltrations de boues sont visibles sur les berges, les rochers et les arbres au pied du stockage qui sert également de décharge pour déchets industriels et résidus d’incinération étalés en surcouche sur les boues rouges (2).
En France, la décharge sous-marine dans la fosse de Cassidaigne, près de Cassis, stérilise les fonds et diffuse en Méditerranée des panaches de contaminations métalliques (3). Le rejet devrait être arrêté en 2015. Les boues rouges déshydratées à 70% sont progressivement stockées dans deux bassins d’une capacité totale de 2,6 millions de m3. Une surveillance mensuelle de la stabilité des digues est réalisée. Cette stabilité doit garantir en tout temps le confinement des boues rouges. Cette garantie est d’autant plus nécessaire que les bassins sont en haut de la colline de Mangegarri. En cas de brèche la mixture boueuse descendrait à la vitesse de 5m/seconde. En plus de l’aléa inondation, l’aléa sismique doit être pris en considération.

En Inde, les réservoirs de boues rouges exposent les populations de l’aval à des risques potentiels considérables (4). Au Vietnam, le renforcement des digues du réservoir de boues rouges du futur complexe de bauxite – aluminium de Tan Rai est en cours. Les autorités disent avoir tiré les enseignements de la catastrophe hongroise. Un citoyen franco-vietnamien, Monsieur Pham Minh Hoang vient d’être condamné à trois ans de prison ferme. Qualifié de dissident, il a à plusieurs reprises attiré l’attention du public sur les risques sanitaires et environnementaux de ce projet sur les hauts plateaux du centre du pays.

(1) Voir le rapport de Robin des Bois « La catastrophe rouge » Etude de terrain en Hongrie et recommandations. – décembre 2010, pdf 46 pages, 8 Mo.
(2) Chapitre sur le stockage de Tata à Almásfüzito extrait du rapport de Robin des Bois sur la gestion des déchets industriels en Hongrie – juillet 2007. Pdf.
(3) Boues rouges en Hongrie : une catastrophe majeure, prévisible et internationale. Communiqué du 6 octobre 2010.
(4) Photos visibles sur http://www.redmud.org/Disposal.html#india

Imprimer cet article Imprimer cet article