Commentaires de Robin des Bois sur la demande d’autorisation de recours à un équivalent pour assurer le retour au Japon de déchets
Robin des Bois est pour l’application stricte de la loi française interdisant le stockage sur le territoire français des déchets radioactifs étrangers et par conséquent est défavorable au tripatouillage de “l’équivalence”. Or, si le projet “CREATES Alternatif” est validé, des centaines de conteneurs standards de déchets compactés issus du retraitement des combustibles irradiés japonais seraient entreposés à La Hague pendant des dizaines d’années, aussi longtemps qu’un stockage géologique ou une autre option ne sera pas disponible en France, ajoutant à la saturation et au cumul de risques dans l’usine de La Hague et la presqu’île qui confine tant bien que mal dans le site mitoyen de l’Andra près d’un million de tonnes de déchets radioactifs.
Selon le document de base qui nous est soumis, rédigé en 2022 par Pascal Aubret, directeur de la “Business Unit Recyclage” d’Orano, “la réalisation de l’opération CREATES Alternatif conduit à la nécessité d’entreposer des objets de façon durable jusqu’à leur expédition vers le site de stockage CIGEO” (page 7). Le mot déchets est évité, une manière de s’affranchir de la loi interdisant le stockage des déchets radioactifs étrangers sur le sol français, voire de la ridiculiser. Cette manipulation sémantique est donc l’œuvre de Pascal Aubret, celui-là même qui en mai 2018 a signé avec l’Ukraine au nom d’Orano un contrat de faisabilité pour le traitement des combustibles usés des réacteurs de type VVER 1000 sur le site d’Orano à La Hague. Pascal Aubret disait alors que “ce contrat marque une étape importante pour Orano et un réel succès. Il ouvrira la voie de la filière française du recyclage aux combustibles usés ukrainiens. C’est également une nouvelle marque de reconnaissance du savoir-faire et des compétences du site Orano La Hague” (communiqué d’Orano en date du 6 mai 2018). A notre connaissance, l’Ukraine ne dispose pas de site ultime de stockage des déchets radioactifs de moyenne et haute activité. Si l’Ukraine envoie en France des combustibles irradiés à retraiter, les déchets issus du retraitement seront sans doute qualifiés par Orano “d’objets” qui pourront très durablement rester sur le territoire français. Sur les bons conseils d’Orano, le Japon et l’Ukraine ne sont pas les seuls pays à frapper aux portes de La Hague et à tenter de s’introduire par effraction juridique dans Cigéo ou un autre futur site de stockage français.
Selon la note de contexte de cette consultation, “le gouvernement français prend acte de l’impossibilité pour les industriels étrangers concernés de prendre en charge les résidus de retraitement de leurs combustibles usés selon le calendrier envisagé”. Aucun document officiel ne vient en appui de cette affirmation. Cette décision de “prendre acte” a été prise en dehors de toute consultation de l’Assemblée Nationale et des corps intermédiaires.
En fait, le gouvernement français aurait dû, étant donné la rupture de l’accord intergouvernemental qui le lie avec le Japon, refuser de continuer à être le sous-traitant d’un pays qui ne respecte pas ses engagements.
Avant de consulter le public sur cette “demande d’autorisation de recours à un équivalent” dans la plus grande discrétion (le faible nombre de contributions en témoigne), avant d’obtenir l’avis de l’ASN et l’éventuelle autorisation du ministre français de l’Energie, il aurait été sérieux et de bonne politique d’obtenir préalablement et officiellement l’accord du gouvernement japonais.
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