Enquête publique – projet de ferme aquacole sur les communes du Portel et de Boulogne-sur-Mer

12 juil. 2023

Observations de l’association Robin des Bois – Projet de ferme aquacole de saumon sur les communes du Portel et de Boulogne-sur-Mer.

Destinataires : Monsieur PIC, Commissaire enquêteur titulaire, Monsieur MOUNIER, Commissaire enquêteur suppléant

Messieurs,

Notre première observation est que les promoteurs et fondateurs de ce projet manquent de fiabilité technique et de fiabilité financière. LOF dispose d’un capital de 1053€. Or le budget prévisionnel de l’opération dépasse 100 millions d’euros.

Monsieur ANESHANSLEY qui est présenté comme le directeur technique de LOCAL OCEAN FRANCE (LOF) dans la description du projet (p.7), se présente comme un spécialiste états-unien de l’aquaculture. C’est surtout un spécialiste de projets et les exemples concrets de ses réalisations manquent de transparence en tout cas dans le domaine très particulier de l’élevage de saumons. Nous sommes très étonnés que ce spécialiste émérite et ses associés n’aient pas eu l’occasion d’organiser un voyage aux Etats-Unis ou dans un autre pays pour prouver la réussite et l’efficacité sur le long terme d’une telle entreprise aux élus et partenaires du Boulonnais.

Monsieur KALUKIN est un professionnel du bâtiment.

Les actionnaires principaux semblent être Monsieur Alain TREUER et une certaine ALCINOOS ADVISORY CAPITAL basée au Portugal. Elle a un capital social de 20.000€.

Dans la convention signée entre LOF et la Communauté d’Agglomération du Boulonnais, ces deux actionnaires s’engagent à verser 800.000€ en caution personnelle et 1.200.000€ en affectation hypothécaire. Pour le moment, les promoteurs bénéficient de deux aides virtuelles de 5 millions d’euros en provenance de la Communauté d’Agglomération et de la Région.

La lettre de manifestation d’intérêt de la Banque Populaire du Nord (BPN) est on ne peut plus évasive et ne garantit en rien qu’elle soutiendra financièrement le projet.

Nos déductions autant que notre intuition et notre connaissance des projets industriels soutenus par des investisseurs étrangers ayant aussi peu d’assises financières nous conduisent à penser que le projet LOF est au mieux un rêve et au pire une arnaque basée sur la crédulité et le fol espoir des autorités locales de contribuer à la résorption du chômage.

Nous notons d’ailleurs que sur le littoral atlantique plusieurs projets de production annuelle de 10.000 tonnes de saumons suscitent des polémiques voire des rejets tandis que le seul élevage de saumon actif en France est en ce moment même exposé à de nombreuses difficultés techniques et financières dans la rade de Cherbourg. Nous notons que le projet PURE SALMON qui était en gestation dans la Communauté d’Agglomération du Boulonnais en janvier 2020 a avorté et qu’il a été transplanté dans l’estuaire de la Gironde où il suscite beaucoup de polémiques et de contestations.

En ce qui concerne la description du projet, nous notons en particulier que les eaux industrielles seront rejetées dans le bassin Ro-Ro à hauteur de 800 à 1000m3 par heure, correspondant à un flux d’azote annuel d’au moins 260 tonnes et de phosphore de 80 tonnes. Cet apport supplémentaire en nutriments qui va se cumuler avec les autres pollutions d’origine industrielle et urbaine et avec les rejets de très mauvaises qualités de la Liane va favoriser l’eutrophisation du bassin Ro-Ro, la prolifération d’algues invasives et aggraver l’insalubrité de la plage de Boulogne-sur-Mer d’autant que les rejets seront aussi chargés en bactéries, en résidus médicamenteux et quoi qu’en dise LOF, en coliformes fécaux. L’impact global de ces rejets pour la faune piscicole est sous-estimé. Le silence est gardé sur les effets de ce rejet sur les espèces protégées comme l’anguille et l’hippocampe.

Il en va de même pour l’impact du pompage en mer à plus de 700m au large de la digue Carnot. Le rôle d’aspirateur du plancton et des poissons des pompes n’est pas quantifié. Il n’y a aucun inventaire des habitats naturels sur les secteurs concernés par la prise d’eau alors que les zones côtières des estuaires de la Manche orientale sont des nourriceries notamment pour les poissons plats. Il n’y a pas par ailleurs d’évaluation de la toxicité, des Eléments Traces Métallique (ETM) et éventuellement de PCB, de PFAS et de substances bromées dans l’eau de mer pompée sur les saumons d’élevage à leurs différents stades.

Les saumons seraient alimentés en grosse partie des granulés de farine d’insectes, de soja, de la farine de poisson et de la farine de crustacés, de la farine de sang de volaille. Les smolts de 200g seraient anesthésiés pour être vaccinés en cas de nécessité. Les promoteurs citent 4 producteurs d’aliments pour l’aquaculture toutes espèces confondues. Près de 11.000 tonnes d’aliment mort alors que le saumon est une espèce active et opportuniste.

Nous sommes extrêmement perplexes sur la viabilité du projet et des saumons. Le seul intérêt de Boulogne-sur-Mer, c’est qu’en cas de mortalité massive, les saumons pourront être récupérés par l’entreprise islandaise qui fabrique à Boulogne des aliments pour animaux.

L’association Robin des Bois est opposée à ce projet et recommande à toutes les parties prenantes boulonnaises de s’en dégager.

Robin des Bois

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