Sur le site internet du ministère de l’Ecologie, tout est net depuis le 17 décembre. Sur le terrain, tout est vague face à la menace des résidus du Prestige, à court et à long terme. Les côtes espagnoles voisines, en Pays Basque et dans les Asturies, luttent contre l’invasion des boulettes et des galettes rejetées sur les rochers, les plages et les hauts de plages au gré des marées. Les boulettes s’infiltrent et s’enfoncent. La récupération est laborieuse, parfois réalisée par tamisage avec les moyens du bord. En France, dans la continuité du littoral, aucune benne n’est prépositionnée en haut de plage, un seul site de regroupement des déchets est en cours de construction, à Mouguerre près de Bayonne. Il est implanté à deux mètres d’un pipeline d’hydrocarbures, et bordé par deux fossés de collecte qui se jettent dans l’Adour. A quelques kilomètres, sur le port de Bayonne, les déchets-ventouse de la marée noire du Capetan Tsanniz attendent depuis cinq ans un traitement hypothétique sous des bâches arrachées.
A Saint-Jean-de-Luz, on attend le fuel “de pied ferme “; sans benne étanche, et sans que les ponts des bateaux de pêche ne soient protégés par des bâches en vue d’éventuelles tentatives de récupération en mer. A San Sebastian, plusieurs bateaux sont déjà fin prêts. Au niveau de la collecte et du stockage, il n’y a pas de réflexion commune de part et d’autre de la frontière.
Le choix des sites français de regroupement des déchets Polmar s’effectue théoriquement selon quatre critères: propriété d’une collectivité locale, inoccupation, pas d’habitation proche et éloignement de tout cours d’eau. Dans les Pyrénées-Atlantiques, un site de regroupement intermédiaire est en construction sur la plate-forme logistique de Mouguerre, où la nappe phréatique est affleurante. Les deux alvéoles de stockage d’une capacité totale de 10.000 m3 et le bassin de collecte des eaux jouxtent deux fossés déjà irisés par des hydrocarbures provenant de la zone de fret. Dans les Landes, pour 100 km de littoral un seul site intermédiaire a été présélectionné, au Centre d’Essai des Landes à Biscarosse. Le terrain est encore nu, sans aucun aménagement. En Gironde, il n’y a pas de site de stockage intermédiaire prévu pour le moment. Il semble que les autorités lorgnent sur les alvéoles de Donges, dans l’estuaire de la Loire, où s’entassent encore plus de 200.000 t de déchets de l’Erika.
En Aquitaine, les déchets de marée noire ont tendance, comme en Bretagne et en Normandie, à fondre dans le paysage. 4.500 tonnes de sable pollué attendent sur les emprises du port de Bayonne. Ils proviennent de l’échouage du Capetan Tzannis, pavillon panaméen, en octobre 1997. La commune d’Anglet cherche depuis cinq ans une solution. C’est elle qui a le bébé sur les bras, au motif que l’accident a eu lieu sur son territoire. La contamination est de 4 à 10 grammes d’hydrocarbures par kilo. Malgré les propos rassurants de la mairie d’Anglet et de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Bayonne, il ne semble pas techniquement possible de réutiliser ces sables en technique routière. Le seuil maximal pour cette valorisation est fixé à 2,5 g d’hydrocarbures par kilo pour les déchets de l’Erika. Robin des Bois demande que l’Etat se substitue à la commune d’Anglet, de même que pour les 70 autres sites de stockage de déchets de marées noires répartis sur la façade atlantique. Le 28 février 2000, le Conseil Interministériel d’Aménagement du Territoire avait décidé d’attribuer 3 millions d’euros pour l’inventaire, et pour les travaux de sécurité et de surveillance des anciens stockages de déchets de marées noires. Trois ans après, les déchets sont toujours abandonnés à eux-mêmes.
Imprimer cet article