Autorisée par un décret du 12 mai 1981 à créer dans son établissement de La Hague une unité de traitement d’éléments combustibles irradiés d’origine étrangère et à stocker à titre provisoire les déchets issus du traitement de ces combustibles irradiés, la Compagnie Générale des Matières Nucléaires est en train de s’enliser dans l’illégalité.
D’autant que la loi relative à la gestion des déchets nucléaires du 30 décembre 1991 interdit, au-delà des délais techniques imposés par le retraitement, le stockage en France des déchets nucléaires issus de combustibles étrangers.
Ces délais sont aujourd’hui dépassés. La construction sur le site de la COGEMA en 1993 d’une unité de réexpédition de ces déchets vers leur pays d’origine en est une preuve mais il y en a d’autres et notamment les réponses des pays concernés aux courriers de l’association Robin des Bois.
En 1995, les autorités allemandes nous faisaient savoir que “la reprise des déchets vitrifiés à haute activité sera terminée d’ici 2003, le premier transport étant prévu cette année même”. Après consultation du Ministère fédéral de l’environnement, de la protection de la nature et de la sûreté nucléaire, notre interlocuteur, attaché scientifique de l’Ambassade de RFA nous précisait enfin : “Selon l’interprétation généralement admise, le calendrier est en conformité avec la loi française du 30 décembre 1991, étant donné qu’il s’agit de délais techniques imposés par le retraitement”.
Mais en contradiction avec ce courrier en date du 29 juin 1995, l’Allemagne n’a pas repris de colis radioactif et a repoussé sine die la première opération de transfert. Cette reculade n’a rien à voir avec le retraitement. Elle a été rendue publique le 21 décembre 1995 quelques jours après une série de sabotages ferroviaires perpétrés dans la région de Francfort et dénonçant le transport de déchets nucléaires jusqu’au site de Gorleben.
Violente ou pacifique, écologiste ou politique, l’opposition au retour dans leur mère-patrie de déchets originellement produits dans les centrales nucléaires allemandes est un refus d’assumer ses responsabilités. C’est aussi pour l’Allemagne une solution de facilité, donnant à penser que pour le pays qui se prétend leader en matière de protection et de conscience de l’environnement, la presqu’île de La Hague est le Tiers-monde de l’Europe.
Informations complémentaires :
– En tant que prestataire de service, toutes les matières nucléaires qu’elles soient réutilisables ou considérées comme déchets, restent la propriété des producteurs étrangers. La COGEMA s’est engagée à retraiter 4755 tonnes de combustibles irradiés allemands auxquels il faut ajouter 576 tonnes de « droit de retraitement » rachetés à la Suède qui depuis 1984 s’est engagée dans le stockage direct de ses combustibles irradiés. En même temps qu’elle rachetait à la Suède le solde de ses capacités de retraitement, l’Allemagne a accepté la responsabilité des déchets issus du retraitement des combustibles irradiés suédois avant la rupture du contrat entre la COGEMA et la Suède.
– La quantité cumulée de déchets de haute activité de responsabilité allemande représente environ 800 m3. Radioactifs pendant plusieurs dizaines de milliers d’années, ils doivent être isolés au-delà de l’échelle humaine, des évolutions climatiques et géologiques. Leurs stockage s’exposent à l’hostilité universelle.
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