Dans le cadre des mesures exceptionnelles de soutien au marché de la viande bovine sinistré par la peur de l’ESB (Encéphalopathie Spongiforme Bovine), la Commission des Communautés Européennes, à l’instigation du gouvernement français, a décidé de “détruire” sans dépistage de l’ESB les bovins âgés de plus de 30 mois. Les cadavres sont directement acheminés vers les clos d’équarrissage où ils sont réduits en farine à incinérer. Sur 500.000 bovins à détruire, on peut estimer entre 750 et 1500 le nombre d’animaux susceptibles d’être porteurs de l’ESB!
Dans le cadre de l’épizootie de fièvre aphteuse, vaches, moutons et cochons sont détruits dans l’improvisation et la cruauté, enfouis ici, brûlés là. Présentée comme une peste par le ministère de l’agriculture, la fièvre aphteuse se soigne, et se traite par vaccination.
A travers ces deux exemples, se dessine un changement de rapport de l’homme avec l’animal et de l’agriculteur avec son cheptel. Naguère sélectionnés, cités en exemple, tirés en portrait et trônant encadrés parmi les photos de famille, les bêtes primées et les troupeaux entiers sont éliminés sur ordre, même s’ils ne sont pas malades. Cette agitation de forcenés préconisée par la filière agro-vétérinaire, de l’école nationale de Maison-Alfort au ministère de l’agriculture, enlève à tous les éleveurs leur liberté d’agir, de soigner, de mettre en quarantaine, de juger.
Des animaux d’élevage, la filière agro-vétérinaire fait des produits dont on peut faire -comme les légumes- des sous-produits à retirer du marché et à déverser en décharge. Tous les prétextes sont bons, même les sanitaires. Il n’a jamais été constaté par Robin des Bois une telle absence de dialogue, un tel manque de transparence. Ceux qui décident se sont lancés dans une logique sécuritaire d”éradication” à grands renforts de roulements de tambours et de mécaniques. Mais les arts martiaux des vétérinaires n’y suffisent pas. Si on les laissait faire, ils iraient jusqu’à envisager de tuer le vent, de vider la mer, de supprimer la faune sauvage. Rien ne les arrête, ils osent même parler de purification par le feu, pratiquer la délation et faire courir la rumeur de l’origine très lointaine des virus incriminés.
Tout cela sent décidément mauvais. Dans quelques jours, quand ils s’en remettront à la vaccination pour la fièvre aphteuse, les fosses puantes et polluantes* continueront dans les sols et les nappes leur sordide travail de mémoire. Pour ce qui concerne la maladie de la vache folle, les bêtes de plus de 30 mois continueront à s’agglutiner dans les fosses et les pulpeurs des clos d’équarrissage sous-dimensionnés, et contamineront des rivières et des prés par des agents beaucoup plus courants que ceux de l’ESB.
* La circulaire du ministère de l’environnement explicitant les conditions d’application de la loi du 10 juillet 1991 relative à la lutte contre la fièvre aphteuse précise qu”il ne sera guère possible d’envisager une construction nécessitant des fondations avant un délai de cinq ans pour les terrains sains, secs, poreux et perméables. Pour les terrains peu poreux et peu perméables, le délai est encore plus long”.
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