Après l’abattage de précaution économique de 500.000 bovins de plus de 30 mois considérés comme bien portant, le ministère de l’agriculture, soutenu par les syndicats agricoles, s’attaque avec la légitimité et les moyens du bourreau aux ovins, en inventant le délit de sale gueule. Il suffit d’avoir vaguement côtoyé ou pu côtoyer un Anglais pour en être la victime immédiate.
Seringues, décharges électriques, pistolets “Matador”, coups de pied, la vindicte et l’arsenal vétérinaires sont sans limites, comme la confusion des mots et les bêlements ministériels sur ce trop fameux “principe de précaution”, définitivement fourvoyé et, nous l’espérons, mis en quarantaine par les responsables des mouvements écologistes. Sur le théâtre de guerre, la “quarantaine”, ex – observatoire des maladies humaines et animales, est désormais un abattage systématique improvisé, mais il ne faut pas désespérer: les brebis et béliers ne sont pas bêtement tués, ils sont “euthanasiés” pour leur bien et leur éviter de tomber malade. De quoi?
D’une maladie qui passe et se soigne avec des applications dans la bouche -et non dans la “gueule”- et sous les sabots de lotions désinfectantes, il a été fait en quelques jours une peste oppressante et manipulée.
En une semaine en France, l’Homme a tué et dilapidé 55.000 têtes de bétail et persiste à s’en féliciter. Cette cruauté remet à sa juste place les “ravages” dénoncés sans relâche par les bergers et les élus, des loups et des ours qui dans les montagnes de France commettent parfois l’irréparable outrage de chasser une brebis, pour la manger. Un mouton présumé croqué par un ours rapporte 1400 F à son heureux propriétaire. Quant aux infortunés éleveurs touchés par la fièvre aphteuse, le gouvernement envisage de leur verser 500 F par individu abattu.
En 1996, une épizootie de fièvre aphteuse s’est déclarée en Albanie, au coeur de l’Europe. Elle a été promptement enrayée grâce à une campagne de vaccinations initiée par l’Union Européenne à laquelle participa le CNEVA, Centre National d’Etudes Vétérinaires et Alimentaires.
En 2001 et en France, faudra-t-il à titre de “précaution” abattre les sangliers, cerfs, chevreuils, mouflons … susceptibles de contracter la fièvre aphteuse, les oiseaux diffuseurs potentiels du virus, et les chameaux dans les zoos?
Ces ignobles fosses creusées dans l’urgence, n’importe où, sans réflexion sur la vulnérabilité des ressources aquatiques, la localisation des puits, les pollutions engendrées par les cadavres, sont autant de véritables risques pour l’environnement et la santé publique. Les bûchers, comme celui de l’aérodrome de Bondues dans le Nord, allumés par l’armée à l’aide de traverses de chemin de fer imprégnées de créosote, dont la combustion est interdite à l’air libre par arrêté ministériel depuis août 1997, dispersent dans l’air et dans les sols phénols, crésols, et hydrocarbures polycycliques aromatiques. Du fioul et des pneus sont également utilisés. Quant aux usines d’équarrissage “haut risque” ponctuellement mobilisées pour transformer en farines animales les troupeaux sacrifiés, elles sont déjà surchargées par le flux continuel des bêtes crevées dans les élevages intensifs, auxquelles s’ajoutent les victimes du programme d’abattage des bovins de plus de trente mois. La saturation de ces sites et leur sous-équipement en matière de traitement des effluents liquides ne garantissent pas le confinement des agents infectieux.
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