Cauchemar en Mer du Nord
La nappe de gaz chaud autour de la plate-forme de production et d’habitation Elgin est explosible en périphérie et explosive au centre. C’est pourtant là que des forces d’intervention d’élite devraient converger avec des moyens maritimes et des équipements lourds pour injecter dans la tête du puits hors de contrôle des boues de colmatage. Aucun employeur normalement constitué ne prendrait une telle responsabilité. Au demeurant, s’il y a bien à Aberdeen une flottille de navires de lutte contre les fuites de pétrole et les marées noires (Oil Spill Response limited), elle n’a pas d’équivalent pour les fuites de gaz. C’est bien là la faute de Total et du gouvernement britannique que d’avoir mis en œuvre et autorisé l’exploitation d’un champ de gaz à haute pression et à haute température à plusieurs kilomètres sous les fonds de la Mer du Nord, sans pouvoir mettre en face les moyens techniques et les ressources humaines capables de maîtriser rapidement les caprices d’une telle bombe sous-marine. Ces risques étaient dès le début de l’exploitation, au début des années 2000, connus et appréciés à leur juste valeur par Total : « A cause de la complexité géologique des strates profondes sous-marines, les pressions peuvent varier de manière très brutale pendant les phases de forage et il y a de réels risques d’éruption de gaz et de pétrole ». Total considérait cette exploitation comme un challenge, une aventure, une avancée industrielle majeure ouvrant des perspectives nouvelles dans le monde et des nouveaux marchés. Il convient de noter sur la scène de la catastrophe la présence à côté de la plate-forme de production et de la plate-forme puits, d’une plate-forme de forage, la Rowan Viking, battant pavillon des îles Marshall selon les meilleures sources ou Panama selon les autres, ce qui promet le moment venu, comme après l’explosion de la plate-forme pétrolière Deep Horizon dans le golfe du Mexique de belles batailles de responsabilités, du type c’est pas moi c’est l’autre.