La complaisance de l’Estonie

27 nov. 2002

Les déclarations cyniques des autorités portuaires de Tallinn se demandant pour quelles raisons le Byzantio et autres navires de cet acabit provoquent tant d’agitation en Europe, et particulièrement en France, témoignent du laisser-aller de l’Estonie en ce qui concerne la sécurité maritime. Les autorités estoniennes ne se posaient pas non plus de questions quand un pétrolier immatriculé aux Iles Marshall a quitté le port de Tallinn, fin mars 2001, avec 30.000 t de fuel lourd en provenance de la raffinerie Texaco; quelques heures après, à la suite d’une avarie de barre, le Baltic Carrier entrait en collision avec un cargo, et 2700 t de fuel lourd partaient à la mer. Les nappes d’hydrocarbures ont contaminé des marais, 3000 oiseaux morts ont été récupérés sur le littoral danois.

Quelques jours après le naufrage du Prestige, l’inspection d’urgence du Byzantio à Rotterdam le 19 novembre, mise en avant par la direction du port de Tallinn, démontre l’improvisation dans la gestion de ce pétrolier. Rien d’étonnant, puisque son gestionnaire est l’Aegean Shipping Compagny basée à Athènes et spécialisée dans la reprise et la surexploitation de navires-citernes en fin de vie.

Cependant, pour éclaircir les idées des responsables estoniens, il faut souligner qu’une grosse partie des moyens européens de récupération d’hydrocabures est mobilisée au large de l’Espagne et dans le Golfe de Gascogne, que la France a notamment envoyé deux navires de servitude, et que l’Espagne a besoin d’un renfort en barrages flottants. C’est pourquoi aucun risque supplémentaire ne doit être pris en terme d’exposition aux marées noires.

D’autre part, suite aux tempêtes de novembre, la Mer du Nord et le Golfe de Gascogne sont encombrés par des épaves à la dérive: des conteneurs tombés des navires, des billes de bois, des débris divers. Outre le Prestige , dont la déchirure de la coque usée au dessus de la ligne de flottaison a sans doute été provoquée par une épave à la dérive, le chimiquier Bow Fagus a été victime d’une voie d’eau après une collision avec un objet non identifié le 21 Novembre 2002 entre le Danemark et la Suède sur la route qui serait celle du Byzantio. En conséquence, la communauté maritime et tous les pays concernés par la trajectoire du Byzantio ont des raisons légitimes de refuser le transit dans leurs eaux de ce navire-poubelle plein de fuel persistant et toxique.

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