La concertation muselée !

14 déc. 2023

Coup de théâtre au Conseil Supérieur de la Prévention des Risques Technologiques (CSPRT).

 

De 9h30 à 11h, la séance du mardi 12 décembre 2023 devait être consacrée à l’examen d’un projet d’arrêté relatif aux prescriptions générales applicable aux incinérateurs de cadavres d’animaux de compagnie. Elle était programmée depuis plusieurs semaines. Tous les agendas étaient bloqués dont celui de Robin des Bois.
A 9h15, la Direction Générale de Prévention des Risques (DGPR) a été obligée de retirer l’examen du projet à la demande du cabinet du Ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. INCINERIS et FUNECAP, les principaux acteurs de la filière Pompes Funèbres Animalières, sont vent debout contre ce projet et quelques minutes avant son examen, ils ont eu sa peau en exerçant des pressions au plus haut niveau.


Les membres du CSPRT, services de l’Etat, juristes, syndicats, élus, ONG, participaient à la séance en présentiel ou en visio. Les deux rapporteurs du projet d’arrêté s’apprêtaient à en expliquer les fondements. Au sein de la DGPR, ils travaillaient sur sa rédaction depuis plusieurs mois. Les experts en risques sanitaires du ministère de la Transition écologique et de la cohésion des territoires étaient aussi prêts à répondre aux questionnements et aux recommandations. Le Président Jacques VERNIER était prêt à jouer son rôle d’équilibriste, de chef d’orchestre et de chasseur de fausses notes.

Le projet visait à réduire d’une manière significative les rejets atmosphériques des crématoriums d’animaux de compagnie et d’animaux domestiques : chiens, chats, oiseaux, hamsters, lapins et autres rongeurs, poissons ornementaux, reptiles, poneys,… Le cheptel est estimé à environ 80 millions d’individus. Les animaux de cirque et les animaux de laboratoire ne sont pas inclus dans la rubrique 2740 de la nomenclature des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement.
INCINERIS et FUNECAP estiment que l’abaissement des seuils des valeurs limites d’émissions atmosphériques (VLE) leur imposera des investissements d’environ 400.000€ par crématorium sans compter les frais de maintenance et d’exploitation des nouveaux dispositifs de filtration. Dans le projet d’arrêté, les seuils de poussières totales sont ramenées à 10 (mg/Nm3), au lieu de 100, de monoxyde de carbone à 50 (mg/Nm3), au lieu de 150, de composés organiques volatils à 20 (mg/Nm3), au lieu de 40, de chlorure d’hydrogène à 30 (mg/Nm3), au lieu de 100 et de dioxyde de soufre à 120 (mg/Nm3), au lieu de 300.

Selon les industriels de la filière, les faibles gains écologiques découlant de ce projet d’arrêté ne sont pas proportionnels aux investissements technico-économiques imposés. Ils s’étonnent du manque d’explications sur les motifs d’ordre sanitaire ou environnemental qui imposeraient un durcissement de la réglementation. Ils souhaitent, si toutefois ce projet d’arrêté venait à être promulgué, que les nouvelles valeurs limites d’émissions (VLE) ne soient applicables qu’à partir du 1er juin 2027 pour les installations nouvelles et à partir du 1er juin 2040 pour les installations existantes.

Le marché de la crémation des animaux domestiques est en plein boum. Il est associé à un grand nombre de prestations. L’incinération collective d’un NAC (Nouvel Animal de Compagnie) est facturée à environ 70€, celle d’un chien ou d’un chat 90€. L’incinération privée est facturée au minimum 250€ avec un supplément pour le toilettage post-mortem.
Plusieurs options sont associées à la crémation. Des urnes reliquaires, des pendentifs cinéraires en argent avec une quantité symbolique de cendres, des mèches de poils sous médaillon, des empreintes de pattes ou de truffes et d’autres variantes payantes sont proposées aux familles endeuillées. Tout est organisé pour que le “panier moyen” de la crémation soit considérablement augmenté par rapport à la prestation de base.

Des projets de crématoriums animaliers fleurissent dans toute la France, par exemple, à Armancourt dans l’Oise, à Vieillevigne près de Nantes, dans le Bassin d’Arcachon, à Luynes dans l’Indre et Loire, à Saint-Laurent-de-Mure dans la région lyonnaise, au Meux dans l’Oise, à Morville-Lès-Vic en Moselle, à Janneyrias en Isère, à Poix-de-Picardie dans la Somme, à Béziers dans l’Hérault, à Milizac près de Brest et à Saint-Martin-Lacaussade en Haute-Garonne.

INCINERIS est la filiale française du groupe VETERNITY qui exploite 28 crématoriums animaliers dans l’Union Européenne, 7 au Canada et aux Etats-Unis. L’ambition de VETERNITY est de devenir le leader mondial des pompes funèbres animalières. VETERNITY a été absorbé par le groupe IVC EVIDENSIA, une multinationale européenne des soins vétérinaires dont NESTLE, fabricant des marques de pet food Friskies, Gourmet, Felix, Pro Plan, est actionnaire.

Le groupe FUNECAP est le leader du secteur funéraire en Europe. Il exploite en France 700 agences de services de pompes funèbres et, par délégation de service public ou en pleine propriété, 115 crématoriums humains. Le chiffre d’affaire annuel s’élève à environ 700 millions d’euros. Pour lui, le COVID-19 a été une bonne affaire. FUNECAP appartient au groupe OPHILIAM et Compagnie. De la crémation humaine à la crémation animalière, il n’y a qu’un pas. Il a été franchi en 2021. FUNECAP exploite déjà deux crématoriums animaliers à Damazan (47) et à Lécousse (35) et prévoit pour 2024 l’ouverture de 3 autres.

 

 

 

 

 

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