L’Assemblée Nationale examine cette semaine en 1ère lecture un projet de loi spécifique visant à autoriser les armateurs à employer des marins étrangers sur les navires de commerce français et sur certains paquebots et navires de plaisance.
Le projet de Registre International Français (RIF) permettrait à des navires battant pavillon français de protéger l’illusion nationale et les intérêts des armateurs, tout en employant des marins du tiers-Monde ou du tiers-Europe. Le RIF est une sorte de délocalisation intérieure qui pourrait, pourquoi pas, s’appliquer aux usines et à des activités de service implantées en France. C’est la déclinaison marine de la Directive Bolkenstein.
Le RIF est, entre autres sources, inspiré du pavillon international norvégien, Norway International Ship Register. Il a été élaboré et soumis aux plus hautes autorités de l’Etat et aux élus par un sénateur du Poitou-Charentes, avocat maritime conseiller de l’armateur norvégien du Bow-Eagle de sinistre mémoire. Le Bow Eagle est entré en collision dans la nuit du 25 au 26 août 2002 avec le Cistude , bateau de pêche des Sables-d’Olonne. Le Bow-Eagle a continué sa route. 4 membres de l’équipage du Cistude ont disparu en mer. La responsabilité de la non-assistance à personne en danger est exclusivement retombée sur un subalterne philippin. Ça aussi, c’est sans doute un des avantages des registres internationaux dans l’esprit de leurs instigateurs.
Au-delà de la fracture sociale à bord (seuls le commandant et son suppléant seraient de nationalité française) et de la cohésion menacée des équipages, ce projet de complaisance à la française a des liens avec la sécurité maritime et la protection de l’environnement. Or, depuis 2 ans, les associations de protection de l’environnement ont été constamment écartées au profit de conversations exclusives entre les syndicats et le secrétaire d’état à la mer. Les pavillons de complaisance ne sont pas que des affaires de gros sous. C’est aussi de gros soucis pour ceux qui s’occupent de la protection de l’océan mondial et de la recherche des responsabilités en cas de dommage environnemental.
Ce projet de loi ne garantit en aucune manière le respect et l’intégrité des marins étrangers embarqués qui pourront du fait du prince se retrouver sur le quai et à leurs frais, une faute grave ou lourde étant dans ces cas-là vite expédiée et entérinée. Les salaires et mesures de protection sociale sont d’autant plus flous et flottants que les marins pourraient être employés non pas par l’armateur mais par des “entreprises de travail maritime” chargées de mettre à disposition de l’armateur des marins étrangers. Ces agences de recrutement, dont les abus de pouvoir sont bien connus, pourront être établies à l’étranger et recruter des jeunes marins de 16 ans à la condition contournable que les embarquements d’une durée maximale de 9 mois soient effectués dans le cadre d’un apprentissage.
Robin des Bois invite tous les députés à rejeter en bloc ce projet non amendable. Les pays européens doivent au contraire réfléchir à une harmonisation, pour leurs ressortissants, des salaires, des protections et des compétences visant à relever le niveau d’efficacité, de fiabilité, et de solidarité des équipages.
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