Les travaux sur l’impact sanitaire des rejets chimiques des installations nucléaires dans le Nord Cotentin menés par le Groupe Radioécologie du Nord Cotentin (GRNC) débouchent sur un résultat inattendu. Les quelques mesures disponibles sur les dioxines dans l’environnement de la presqu’île de la Hague, et plus précisément du complexe nucléaire de la Cogéma, révèlent des teneurs très importantes dans le milieu naturel, plus précisément dans l’herbe (4,02 picogrammes par gramme). Si l’on se réfère aux facteurs de bioaccumulation généralement pris en compte par les toxicologues, le lait produit par des vaches consommant exclusivement de l’herbe telle que celle qui a été analysée contiendrait 8 picogrammes de dioxines par gramme. Il ne serait pas commercialisable et devrait être détruit dans un incinérateur de déchets industriels spéciaux. Le rapport final suggère que l’ensemble de la presqu’île fasse l’objet d’une campagne systématique de mesure des dioxines.
La seule source locale officiellement identifiée est l‘incinérateur de déchets de la Cogéma, implanté dans l’enceinte de l’usine. Il fonctionne depuis 1995 et brûle des ordures ménagères, des papiers, des cartons, des plastiques et des rebuts des services administratifs. Il a une capacité de 1.700 tonnes par an. Sa gestion est journalière, ce qui facilite les phases de formation des dioxines à l’allumage et à l’extinction.
A la veille de la dernière réunion du groupe d’experts, la Cogéma a annoncé la fermeture de l’incinérateur d’ici la fin de l’année 2002, “pour des raisons économiques”. La Cogéma a estimé que “la mise aux normes européennes rendrait nécessaire des modifications profondes. Le coût est tel qu’il condamne l’installation”. La décision prise par l’industriel du nucléaire va poser un nouveau problème: l’exportation des déchets vers les exutoires de la société civile.
En Bourgogne, l’incinérateur d’Is-sur-Tille fermé en 1999 et ses mâchefers sont contaminés par du strontium 90, un radionucléide toxique qui se fixe dans les tissus osseux et les dents. La présence anormale de strontium 90 dans les poussières et mâchefers s’explique par la combustion dans l’incinérateur rural d’Is-sur-Tille de gants, surbottes et autres accessoires amenés par un client particulier: le Centre d’Études de Valduc géré par le Commissariat à l’Énergie Atomique.
De même, en Poitou-Charentes, en juin 2002, la décharge de Saint-Sauveur a été par erreur destinataire de fioles de radium dont les militaires d’une caserne de Poitiers (14ème BS Mat) s’étaient négligemment débarrassés.
Traités en externe, les déchets dits “banals” de la Cogéma devront faire l’objet d’une traçabilité infaillible, et les modalités de sortie du site nucléaire et d’acceptation dans la décharge ou l’incinérateur désignés devront être particulièrement strictes à chaque voyage.
Imprimer cet article