Le culte de Montchanin

21 sept. 1993

N°1
La Baule – Septembre 1993
Contribution de Robin de Bois aux 2èmes Assises Nationales des Déchets Industriels

En 1978, s’ouvrait à Montchanin un dépotoir mixte de déchets ménagers et industriels à proximité d’un lotissement, de la gendarmerie et du collège. L’enquête publique préalable a recueilli, dans une commune qui compte 6000 habitants, 10 avis, dont la majorité était favorable au projet. Malgré l’inquiétude d’une poignée de riverains de la décharge et l’action du président de l’ADEM (Association de Défense de l’Environnement Montchaninois), c’est seulement en 1988 que Montchanin sort de son apathie et obtient la fermeture (provisoire et sans doute définitive) du dépotoir.

Depuis, les “écologistes”, dans leur immense majorité, tentent de capitaliser les miasmes et les asthmes de Montchanin afin de refuser tout projet de gestion moderne et rationnelle de déchets ménagers et industriels. Ils s’offusquent avec vertu des exportations de déchets vers le Tiers Monde, des mouvements de déchets dans les zones frontalières, des milliers de décharges sauvages fleurissant dans les campagnes et les banlieues ; les mouvements écologistes alimentent le syndrome anti déchets et du haut de leur chaire, dispensent avec onction des sermons sur le recyclage considéré comme l’Eden des déchets (voir Flèche N°21, spécial recyclage).

Aussi, les incinérateurs, soumis aux dernières normes européennes sont des machines à tuer, expulsant par leurs cheminées des milliers de têtes de mort et de dioxines, ces affreuses petites bestioles qui génèrent une cohorte bien connue de gênes : mutagènes, tératogènes, cancérigènes. A la veillée ou dans les soirées d’information des comités de défense, on se raconte des histoires délicieuses de cochons d’Inde tués sur le coup avec une injection de 0,6 microgramme de dioxine et l’on se repasse au magnétoscope le reality show de Montchanin où l’on croit voir, à l’aube, arriver les 41 fûts en direct de Seveso.
De même, les nouveaux centres de stockage des déchets sont eux aussi des lieux de perdition. D’ailleurs, la plupart de leurs gestionnaires sont des gens cupides aux dents longues et aux mains gantées qui se demandent chaque matin de combien de fûts ils vont s’enrichir.

Rien n’y fait, ni les nouveaux textes français et européens sur la gestion et l’élimination des déchets, ni les Commissions Locales d’Information et de Surveillance, ni les certificats d’acceptation préalable, ni l’exploitation hors eau des alvéoles, ni le cumul des précautions actives et passives.

Discourant et brodant sans fin sur la pathologie virtuelle des incinérateurs et des décharges modernes, le public néglige la réalité, comme la pandémie mondiale de choléra et ses 139 vibrions qui prolifèrent partout où les déchets ne sont pas ramassés, concentrés, réduits, neutralisés.
Dans leurs jardins, nos heureux nantis écolos, évoquent fièrement le “zéro déchet”, qui récemment, par un glissement de mots curieux, mais finalement prévisible est devenu dans d’autres bouches le “zéro immigré”.
Les réactions xénophobes se multiplient. Dans un canton, on ne veut pas des déchets du canton voisin ; un tract récent condamnant le projet d’une classe I dans le Poitou-Charentes met en garde la population sur les risques d’arrivée des déchets en provenance…du Limousin.
Le rejet des déchets fortifie l’intolérance et la peur comme l’exprime ce commentaire du porte- parole d’un parti politique après l’invasion des belles décharges française par quelques seringues allemandes : “En Europe, il n’y aura aucune possibilité d’empêcher que la France devienne la poubelle de l’Europe et le réceptacle de toutes les immigrations”.

Les fondateurs de Robin des Bois ont tous contribué dès 1980, quand ils travaillaient chez Greenpeace, à dénoncer l’imprudence et la négligence dans le commerce et l’élimination des déchets. C’est en partie grâce à la documentation de Robin des Bois que l’hebdomadaire Politis a fait resurgir en 1990 le point noir de Montchanin. Aujourd’hui, il est aussi urgent de contribuer à restaurer la confiance et la logique et c’est beaucoup plus difficile que de perpétuer la panique.

 

 

 

 

 

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