Convention sur le Commerce International des Espèces de Faune et de Flore sauvages menacées d’extinction
CITES 2002 – Santiago du Chili
Les carnages industriels et la massification des violences humaines font passer au second plan l’état de la faune sauvage confrontée dans ses dernières réserves au pillage international, à la frénésie des collectionneurs et au financement des guerres ou des troubles par le commerce des ressources naturelles. C’est pourquoi la réunion de la Convention de Washington (CITES) qui s’ouvre le 3 novembre à Santiago du Chili en présence des délégations des 159 pays-membres, des principales organisations non-gouvernementales impliquées dans le commerce des plantes et des animaux ou dans la protection des plantes et des animaux revêt un intérêt exceptionnel. Les discussions et votes qui interviendront sur l’éléphant et la légine, un poisson austral convoité par tous les mareyeurs de l’hémisphère sud et de l’hémisphère nord, témoigneront ou non de la volonté de la communauté internationale et de sa compétence à juguler les prédations et à préserver la biodiversité.
Regroupés autour de l’Afrique du Sud, le Zimbabwe, le Botswana, la Namibie et la Zambie tenteront d’obtenir l’autorisation d’exporter 87 tonnes d’ivoire brut à destination du Japon et d’autres pays non-identifiés. D’autres pays de l’aire de répartition de l’ivoire seraient favorables aux demandes de l’Afrique australe sous réserve que le renforcement du contrôle inter-africain soit appliqué, ce qui dans les conditions passées, actuelles, et à moyen terme ressemble à un voeu pieux. Le commerce international de l’ivoire a été suspendu en 1989 et partiellement réouvert en 1997, à titre expérimental. Le Kenya et l’Inde qui constatent aussi une recrudescence de la contrebande et du braconnage dans le continent asiatique depuis 1997, proposent à l’occasion de la réunion de Santiago la réinscription totale de l’éléphant à l’annexe I de la Convention. Cette ombrelle juridique garantit l’interdiction du commerce international légal d’une espèce ou de ses sous-produits. Un kilo d’ivoire brut se négocie autour de 100 US$. En France, le Ministère de l’Écologie a défendu la proposition de l’Inde et du Kenya durant la dernière réunion préparatoire européenne, mais cette position, qui devait être en dernier ressort soumise à l’arbitrage de Matignon, n’a toujours pas été rendue publique.
Dans l’océan austral et antarctique, la légine, poisson des grands fonds à croissance lente et à maturité sexuelle tardive, est cernée par une flotte de navires légaux, toujours plus nombreux et efficaces, dont des unités françaises regroupées à Saint-Denis de la Réunion, et des cohortes de navires illégaux servis par des équipages asiatiques et européens et appartenant à des intérêts espagnols, norvégiens et russes. La violence et les risques sont là aussi au rendez-vous. L’enjeu est considérable au regard de l’exploitation des ressources antarctiques et le marché aiguise les appétits. Une marée de quelques semaines se négocie autour de 600.000 euros. La proposition de l’Australie vise à inscrire les deux espèces de légines à l’Annexe II de la convention et ainsi à soumettre le commerce international à des permis d’exportation et d’importation qui assureraient la traçabilité et élimineraient les lots en provenance des navires IUU (Illegal-Unregulated-Unreported). La France n’est pas à ce jour favorable à la proposition australienne qui pourtant contribuerait dans une large mesure à la lutte contre ce que les observateurs économiques et militaires qualifient de “mafia des mers”.
Parmi les autres espèces qui feront débat: deux espèces de requins, les dauphins de la Mer Noire, deux espèces de rorquals, les hippocampes, la vigogne, le nandou de Darwin, des perroquets, des tortues terrestres et aquatiques, le papillon rose du Sri Lanka, le pin du Chili, des cactus, des orchidées, le bois de gaïac.
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