Les PCB (Polychlorobiphényles) ne nuisent plus gravement à la santé. Ils ont été utilisés entre 1930 et 2000 dans les transformateurs électriques et des produits de consommation courante. Le Ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire est à la barre. Il pilote une simplification réglementaire. A son instigation, les autorités françaises vont porter au niveau de la Commission Européenne le doublement de la teneur maximale admissible de PCB dans les poissons sauvages d’eau douce. Elle est actuellement de 125 milliardièmes de g par gramme de chair (125 ng/g), elle passerait à 250 et permettrait ainsi de raccourcir la liste douloureuse des cours d’eau et des lacs frappés par des interdictions de consommation et de commercialisation de plusieurs espèces de poissons.
Pour ce travail de sape, la Direction Générale de l’Alimentation s’appuie sur un avis obscur et alambiqué de l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) en date de juillet 2015. Malgré les 29 avis précédents des agences sanitaires, celui de juillet 2015 a accepté la consommation raisonnée de poissons-poison. Seuls des responsables du Comité National de la Pêche Professionnelle en eau douce et du Comité National des Pêches maritimes et des élevages marins et des représentants du Ministère de l’Agriculture ont été auditionnés par le groupe d’experts à l’exclusion des associations de défense des consommateurs ou de protection de l’environnement.
Les recettes des Top Chefs de l’ANSES et du Ministère de l’Agroalimentaire ne manquent pas de sel. Les poissons dont la contamination au delà des normes réglementaires est reconnue peuvent être désormais consommés avec des pincettes ou sans limites selon que les espèces sont très fortement, fortement ou faiblement bioaccumulatrices.
S’appuyant sur cette nouvelle doctrine, les préfets de la Dordogne, de la Gironde et de la Charente-Maritime ont levé au début de l’été les mesures de restriction de pêche et de commercialisation des anguilles, des aloses feintes, des barbeaux, des brèmes, des carpes et des silures. Le préfet de Haute-Savoie s’apprête à faire de même pour les truites et les ombles chevaliers du Lac Léman.
Le préfet de Gironde dans son communiqué du 2 août 2016 ment en gras. Il dit que “les poissons ne sont pas contaminés par les PCB”. Le “dîner presque parfait” qu’il imagine va diviser les convives. Les femmes en âge de procréer, les enfants de moins de 3 ans, les fillettes et adolescentes doivent se serrer la ceinture et manger de la carpe 1 fois tous les 2 mois tandis que les personnes âgées, les garçonnets, les adolescents et les hommes adultes peuvent en manger 2 fois par mois. Quant à la consommation de l’anguille, elle doit rester pour tous “exceptionnelle”.
L’opinion publique n’en a cure. Le grand journal régional titrait le 3 août : “Les amateurs peuvent se lécher les babines. Les anguilles de grande taille vont pouvoir atterrir dans leur assiette”. Les vieilles anguilles sont justement les plus contaminées.
Position de Robin des Bois:
Les arrêtés préfectoraux d’interdiction de consommation et de commercialisation doivent être maintenus.
L’abrogation généralisée serait un encouragement à pêcher, à braconner, à commercialiser dans des circuits non contrôlables y compris internationaux des poissons contaminés et interdits de consommation à l’échelle européenne. Nous notons à cet égard que le préfet de la Gironde pionnier dans le domaine précise que les civelles sont taillables, corvéables et consommables sans aucune restriction alors que les civelles, alevins des anguilles et les anguilles sont en voie d’extinction à cause de la surpêche et des pollutions par les PCB, le mercure et d’autres polluants persistants.
Ces mesures d’allègement nuisent à la santé publique. Depuis 2013, les PCB sont classés cancérogènes pour le genre humain par le CIRC. En marge de la population générale, certaines communautés sont fortement consommatrices de poissons d’eau douce et dans les conditions économiques actuelles la pêche dite de loisirs est souvent une pêche vivrière.
Le plan national d’actions sur les PCB doit être énergiquement relancé avec des actions concrètes sur les sites terrestres et aquatiques contaminés. Les analyses de poissons dans tous les bassins doivent être renouvelées et multipliées. Les plus récentes datent de 2010 et ne permettent pas de suivre les évolutions spatiales ou temporelles de la contamination par les PCB dans les bassins versants.
Les autorités françaises doivent dans l’état actuel des connaissances sur la contamination de la faune aquatique renoncer à toute tentative de modification du règlement communautaire portant fixation des teneurs maximales pour certains contaminants dans les denrées alimentaires. Cette démarche ouvrirait la voie à l’élévation des seuils pour d’autres produits que les poissons d’eau douce, comme le lait, les œufs, la viande.
La pollution se combat sur le terrain à la source, elle ne se dissimule pas sur papier dans la réglementation.
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