Notre-Dame de Paris, communiqué n°1
Après la fusion d’au moins 300 tonnes de plomb dans les garnitures de la flèche et dans la toiture, l’emprise de Notre-Dame de Paris est un site pollué.
La cathédrale est aujourd’hui rendue à l’état de déchet toxique. Pour en connaître la complexité, il serait utile à partir des archives, des connaissances de spécialistes en art liturgique et des témoignages de ceux qui ont participé à la maintenance récente de faire la cartographie de toutes les substances toxiques employées et embarquées dans ce vaisseau historique.
Les eaux d’extinction, les cendres, les suies, les gravats au sol et dans les parties aériennes doivent être, dès que la sécurité pour les travailleurs sera garantie, caractérisés, triés, regroupés et orientés vers des sites légaux et confinés de stockage et d’élimination. Les bois calcinés doivent aussi être considérés comme des déchets. Ils étaient en contact avec les feuilles de plomb et traités au fongicide.
Cette opération d’assainissement est un préalable à la reconstruction. Avant de lancer un appel d’offres pour la conception d’une nouvelle flèche, il faut lancer un appel d’offres pour la décontamination de ce qui, hélas, peut aussi être provisoirement considéré comme une friche industrielle.
Les alternances de pluie, d’orages, de sécheresse et de vent vont faciliter la migration du plomb dans les sols et la mobilisation de poussières toxiques en cas d’exposition et d’inhalation prolongées.
Le risque plomb était jusqu’alors reconnu et signalé dans les arrondissements du nord de Paris. A partir de la source de Notre-Dame incendiée, il pèse désormais sur l’île de la Cité et sur les sédiments de la Seine.
Les hommages ne réparent pas les dommages surtout quand ils sont sanitaires. Robin des Bois recommande que tous les pompiers et sauveteurs qui ont participé à la lutte contre l’incendie et à la récupération en urgence d’antiquités soient soumis dans les semaines qui viennent à un contrôle de la plombémie. Les signes cliniques de l’intoxication par le plomb ne sont pas immédiatement perceptibles. Le saturnisme avance masqué.
Pendant plusieurs mois sinon années, les habitants et usagers du périmètre sinistré pourront être soumis à l’inhalation de poussières de plomb. Il serait par conséquent prudent, sous la tutelle de l’Agence Régionale de Santé, de mettre en œuvre un protocole de surveillance sanitaire et de vigilance environnementale notamment dans les jardins privés et publics en commençant par le square Jean XXIII, le square René Viviani et les jardins de l’Hôtel de Ville. Le miel des abeilles survivantes du sinistre pourrait être un indicateur significatif si elles sont maintenues dans cet environnement hostile.
En cohérence avec sa mission de détection des polluants atmosphériques, il serait logique qu’Airparif soit mandatée et équipée pour mesurer dans l’île de la Cité la quantité de poussières atmosphériques de plomb et des autres substances volatiles émises par l’incendie. Il est anormal vu la fréquence, l’intensité et la diversité des incendies à Paris et en Ile-de-France que leurs effets spécifiques ne soient pas systématiquement suivis, quantifiés et portés à la connaissance du public.
Copie des courriers envoyés à différents ministres et services de l’Etat, plus AirParif, mardi 23 avril après-midi avant le Conseil des ministres et la présentation du projet de loi Notre-Dame de Paris.
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Destinataires : Monsieur le ministre de la Culture, Monsieur le ministre de la Transition écologique et solidaire, Madame la ministre du Travail, Madame la ministre des Solidarités et de la Santé, Monsieur le directeur de l’Agence Régionale de Santé Ile-de-France, Madame la directrice d’AirParif
Copie à : Madame la maire de Paris
Mesdames, Messieurs,
Veuillez trouver ci-dessous les inquiétudes, les interrogations et les propositions de l’association Robin des Bois après l’incendie de Notre-Dame de Paris.
1- Suite à la combustion de plusieurs centaines de tonnes de plomb et autres matières toxiques mises en œuvre dans sa flèche, sa toiture et des œuvres liturgiques dont des vitraux, nous vous prions chacun dans votre domaine et dans votre périmètre de compétence de mettre au point le plus vite possible, un protocole coordonné de suivi des poussières et particules de plomb et autres substances toxiques dans et autour de l’emprise de la cathédrale et sur la trajectoire proche et lointaine du panache jusque dans la baie de Seine. La couleur dominante beige/orange est spécifique de la volatilisation du plomb selon la bibliographie disponible et les témoignages de plusieurs chimistes nationaux et internationaux. Les documents historiques précisent que le plomb métal (allié à de l’argent, de l’antimoine et de l’arsenic en faibles proportions) n’est pas la seule source de composés de plomb issus de l’incendie. Le minium a aussi été utilisé dans certaines œuvres d’art liturgique comme pigment et en tant que peinture anti-corrosion notamment dans la flèche érigée par Viollet-le-Duc. Il est d’autre part fort probable qu’au cours du XVIIème, du XVIIIème, du XIXème et de la première moitié du XXème siècle, des peintures cérusées à base de blanc de plomb, pigment inorganique de synthèse obtenu à partir de l’oxydation du plomb, aient été utilisées dans les rénovations successives de l’intérieur de la cathédrale. Nous ne connaissons pas à ce jour la composition du vernis original qui a revêtu la charpente en chêne pour la protéger du pourrissement dû à la proximité immédiate des feuilles de plomb. Les connaissances des historiens devraient être requises à ce sujet.
2- Nous souhaitons que les déchets y compris les bois carbonisés et souillés soient tous considérés comme toxiques et manipulés, transportés, stockés ou éliminés dans les règles de l’art par des spécialistes équipés de tous les Equipements de Protection Individuelle obligatoires sur des chantiers d’une telle ampleur et d’une telle complexité.
3- Dès que les conditions de sécurité seront réunies, il nous paraît aussi primordial de procéder par les moyens les plus efficaces au retrait d’un maximum de poussières, suies et cendres déposées sur les parties aériennes de la cathédrale et à l’intérieur afin d’éviter la dispersion sur le long terme des substances toxiques sous l’action de la pluie, des infiltrations, du vent, des courants d’air, de l’humidité et de la condensation.
4- Des plombémies chez les pompiers et autres intervenants qui ont lutté contre l’incendie ou qui sont restés en renfort pendant tout le temps de l’intervention active et de la surveillance des lieux après l’extinction de l’incendie nous paraissent nécessaires à titre de précaution.
Dans l’attente de votre réponse sur ces 4 points et en étant évidemment disponibles pour des échanges complémentaires, nous vous prions d’accepter nos salutations respectueuses.
Robin des Bois.
A lire parmi les messages reçus par Robin des Bois, celui du professeur Michael Anderson de l’université de Manchester, 23 avril 2019.
I am a Professor of Physical Chemistry at The University of Manchester, UK. I am very concerned about the levels of lead pollution following the fire last week at Notre Dame. Please excuse me writing in English.
The pollution spread by the fire is very extensive. Contrary to what I here being reported that the lead was contained at the Cathedral, actually almost all the lead has been dispersed across Paris. The reason is as follows.
Lead melts at 327 C and therefore quickly became molten and poured off the roof (this can be seen in videos). The molten lead fell on to the top of the vaulted ceiling and therefore remained in the roof space. Although the boiling point of lead is 1749 C it evaporates at all temperatures below this. For example, a typical fire temperature of 1000 C will give a lead vapour concentration of about 2000 parts per million (ppm) rising to around 275,000 ppm at 1500 C often experienced in major fires at roof level. That is, about one quarter of the vapour would be lead the other three quarters air.
However, lead is pyrophoric and reacts extremely rapidly with oxygen to give lead oxide. This is an extremely exothermic reaction, the enthalpy of reaction which is about -200 kilo joules per mole. This gives out 50 times more heat than burning wood. Indeed it will burn white hot. This heat will in turn rapidly evaporate off more lead which will immediately turn into lead oxide. So the temperature of the fire is the temperature of burning lead not of burning wood (i.e. much hotter).
The lead oxide, which is initially a vapour rapidly cools as it comes out of the cathedral and turns into solid lead oxide particles. They will probably only grow to nanoparticles, a few 10s or 100s of nanometers across. The colour of lead oxide is from yellow to orange to red as PbO and black as PbO2. These are the colours of the smoke emanating from the cathedral. In videos you can see the plume then raining down in streaks over Paris which will be the very dense (much heavier than air) particles of solid lead oxide.
The drone footage of the cathedral after the event suggests not much lead left on top of the vaulted ceiling of the cathedral suggesting that most of the hundreds of tons of sheet lead has been converted into lead oxide particles which have been spread across Paris in a direction towards the Eiffel Tower.
It is really important that the streets of Paris under the lead plume are analysed for lead as quickly as possible and before it starts to rain. This is unlikely a problem of air pollution but of solid particles on the ground. When it rains any lead particles will be carried into the water courses. People should be advised to be careful what they touch for a while in Paris until the situation is properly assessed.
Also, the people who witnessed the event and could smell the fumes were breathing in lead oxide particles and so should be advised to have blood tests for lead. This includes all the fire brigade and all the thousands of tourists who came to watch (especially of course children).
Please contact me if you would like some further discussion of the matter
Kind regards
Professor Michael Anderson
Du côté des autorités:
Communiqué de presse de la Préfecture de Police de Paris, de l’ARS Ile-de-France et de la Préfecture d’Ile-de-France, 27 avril 2019
Communiqué de presse de la Préfecture de Police de Paris et de l’ARS Ile-de-France, 9 mai 2019
Lien vers les publications de Robin des Bois concernant l’incendie de Notre-Dame de Paris.
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