Le 16 juillet 2008 à Genève, trois semaines avant le début des Jeux Olympiques, la Chine a obtenu le statut de partenaire commercial du trafic légal de l’ivoire. Cette distinction renforce aussi sa position incontestée de leader du trafic illégal de l’ivoire. Des milliers de commerçants détaillants en ivoire à travers la Chine pourront avoir la tête haute et recevoir sans problèmes les touristes. Dans quelques mois conformément au processus mis au point par la CITES (Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction,), la vente aux enchères de 108 tonnes d’ivoire détenues par l’Afrique du Sud, le Botswana, la Namibie et le Zimbabwe sera dynamisée par la présence de deux acheteurs, le Japon jusqu’alors seul candidat potentiel et la Chine. Un peu d’ivoire légal suffit à blanchir beaucoup d’ivoire illégal et il n’y a aucun doute sur le fait que le prix de la matière première va s’envoler après cette entrée de la Chine à la bourse internationale de l’ivoire. L’Afrique du Sud et les pays voisins applaudissent mais 27 pays africains sont en colère et redoutent une recrudescence du braconnage. Cette décision qui ouvre officiellement le marché de l’ivoire à plus d’un milliard d’acheteurs potentiels a été prise sans prendre en compte les risques d’extinction des éléphants sauvages sur le continent africain. De plus, elle va en particulier permettre au dictateur Mugabe (Zimbabwe) de troquer avec la Chine de l’ivoire contre des armes comme il en a déjà pris l’habitude.
Fidèle à une vision anarchique du commerce international, la Grande Bretagne et la Bulgarie au nom de l’Union Européenne et sous l’influence de l’Allemagne ont voté pour cet accord. La présidence française n’a rien fait pour s’y opposer. Il s’agit d’une décision politique dans le cadre d’une convention internationale à vocation environnementale. Dans un certain sens, on peut dire que les éléphants font contrepoids au Dalaï Lama et que l’ivoire dans ces circonstances diplomatiques délicates sert à faciliter l’exportation depuis l’Europe vers la Chine d’équipements aéronautiques, ou nucléaires ou de machines-outils. Cette décision est en partie fondée sur les conclusions optimistes d’une mission de trois jours en Chine de trois sous-chefs de bureau du Ministère allemand de l’Environnement. Au même ministère à Paris, on dit que « toutes les garanties ont été obtenues de la Chine au sujet de la gestion de l’ivoire légal ». La traçabilité de l’ivoire en Chine serait parfaite. La CITES elle-même apporte sa pierre à la sérénité unanime : au nom de ses 173 pays membres, l’organisation internationale considère sans scrupules que la peine de mort imposée aux contrebandiers en ivoire est la meilleure preuve du sérieux de la Chine dans ce domaine. Le Japon et l’Islande ont voté en faveur de la demande de la Chine. Ces deux Etats peuvent plus que jamais compter sur son soutien dans le cadre de la Commission Baleinière internationale.
Dessins Bruno Congar pour Robin des Bois
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