Un arrivage de plutonium retraité au Royaume-Uni est attendu dans le port commercial de Cherbourg. Ce premier voyage est partie d’un contrat global initial portant sur « quelques centaines de tonnes ». Le plutonium est utilisé dans des combustibles de réacteurs nucléaires civils et il peut aussi être utilisé avec un réel taux d’efficacité dans les armes de destruction massive. L’épandage ou même l’immersion provisoire de plutonium au fond de la mer de la Manche suite à un attentat ou à un accident survenus au navire porteur jetteraient toute l’Europe du Nord dans une crise sociale, économique et écologique importante et durable.
Et pourtant, sauf s’il s’agit d’un leurre, le navire choisi par les autorités anglaises et accepté par les autorités françaises pour ce convoi exceptionnel est certes une acquisition récente pour la compagnie spécialisée James Fisher mais est néanmoins un vieux roulier -c’est-à-dire un garage flottant- construit en 1986 ; l’Atlantic Osprey joue dans la catégorie du Montlouis, qui le 25 août 1984 après un abordage avec un car-ferry a coulé en quelques minutes avec 400 tonnes d’uranium à bord au large d’Ostende.
Tous les autres navires spécialisés de la flotte Fisher sont présentés comme quasiment insubmersibles. Tous les organes de sécurité sont doublés dont la coque ; ils bénéficient de l’agrément INF3 -Irradiated Nuclear Fuel-. L’Atlantic Osprey, avec sa simple coque bénéficie du seul agrément INF2 conforme au code de l’Organisation Maritime Internationale mais reste un navire vulnérable et facilement submersible en cas de voie d’eau.
L’Atlantic Osprey fera plusieurs voyages et il est imprudent d’introduire cette navette plutonium à travers le dispositif de séparation du trafic maritime de la Manche. Le « rail » de la Manche est le plus fréquenté du monde avec le détroit de Malacca. Le fait que l’Atlantic Osprey soit escorté par des navires militaires ne retranche rien de sa vulnérabilité intrinsèque. L’intérêt pour les utilisateurs est de pouvoir charger et décharger sur remorque les colis de plutonium à partir des rampes utilisées pour les car-ferries. La banalisation du plutonium dans le détroit de la Manche constitue indiscutablement un risque supplémentaire dans un trafic dense et insuffisamment maîtrisé où abondent les bombes flottantes traditionnelles.
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