Rattrapés par les ronces, colonisés par d’autres métiers des déchets, les incinérateurs d’ordures d’une capacité de moins de 6 tonnes/heure se terrent. Le tonnage global des déchets incinérés par ces installations en région Rhône-Alpes est évalué à environ 5 millions de tonnes. Ouverts entre 1967 et 1990 et fermés entre 1982 et 2002, ils sont des sites potentiellement pollués. Lors de leur conception, il n’y avait pas de distinction entre les déchets ménagers, les déchets industriels banals, les déchets agricoles et de garages, et les déchets d’activités sanitaires. Les contrôles à l’entrée des sites étaient inexistants et en sortie des cheminées se cantonnaient à des paramètres simplistes conformes à la réglementation de l’époque et terriblement insuffisants au regard de la protection des riverains et de l’environnement.
Les pouvoirs publics, les collectivités locales et les exploitants (filiales de Vivendi et de Suez-Lyonnaise) n’ont pas intérêt à évaluer le passif environnemental de ces installations dont les résidus de combustion -cendres et mâchefers- chargés de micropolluants ont été le plus souvent stockés à même le sol attenant ou dans des décharges brutes souvent qualifiées à posteriori par les services administratifs de “Centre d’Enfouissement Technique”. Les métaux lourds transportés par les fumées sous des formes particulaires se sont déposés et accumulés au fil des décennies d’exploitation en champ proche des cheminées. L’impact de la migration et de l’accumulation des métaux lourds dans les sols suite au “rinçage” des mâchefers par les eaux de pluie est sous-estimé.
Une étude sur les petits incinérateurs portant sur les émissions atmosphèriques et solides de dioxines et autres composés chlorés devait être finalisée en 1999 par l’ADEME. Elle n’est pas communicable auprès du public.
C’est pourquoi Robin des Bois mène de sa propre initiative un inventaire des incinérateurs fermés depuis 20 ans et des décharges associées. L’inventaire Rhône-Alpes est le premier à être publié. La région a dans ce domaine un patrimoine important et inégalé. Il représente environ 25 % du parc national. Aucun site n’a fait l’objet d’un mémoire de fermeture obligatoire depuis 1994. A ce jour, seulement 6 Études Simplifiées des Risques (ESR) ont été réalisées ou sont en cours de validation, en application de la politique nationale de la gestion des sites pollués. Elles portent l’empreinte du minimalisme technique et financier des cabinets d’audit et des collectivités. Les mâchefers y sont souvent considérés comme valorisables au seul regard de quelques analyses de polluants. La granulométrie du mélange cendres, mâchefers et les teneurs en déchets imbrûlés les rendent pourtant sysématiquement impropres à l’utilisation en travaux publics. Les hydrocarbures et le cuivre sont oubliés, les dioxines sont rarement abordées. Aujourd’hui, un incinérateur de concéption moderne et en bon état de maintenance produit 168 µg I-TEQ de dioxines par tonne brûlée dans les REFIOM (Résidus d’Épuration des Fumées d’Incinération d’Ordures Ménagères). Ce qui correspond à 16,8 g I-TEQ de dioxines pour 100.000 tonnes de déchets incinérés. Essentiellement piégées dans les REFIOM en association avec d’autres polluants, les dioxines sont confinées dans des centres de stockage de classe 1 et leur disponibilité pour l’environnement est considérée comme faible. Hier, ces dioxines étaient réparties dans les mâchefers, dans les cendres et à la périphérie du site par retombées atmosphériques. Il n’existait en effet aucun traitement des fumées, on se contentait à l’époque d’un rudimentaire dépoussiérage…
Les services de l’État, les détenteurs des sites, les associations locales et régionales de protection de l’environnement sont destinataires du rapport d’étape de Robin des Bois. Ce travail préliminaire devrait aider et inciter les différents observateurs et intervenants à mieux cerner les pollutions et les risques, et à agir dans les situations urgentes.
Voir également le dossier.
Suite aux inventaires régionaux d’incinérateurs fermés réalisés par Robin des Bois, un guide méthodologique a été publié par le BRGM. Même s’il ne réflète pas toutes les opinions émises par le groupe de travail préparatoire dont Robin des Bois faisait partie, ce document constitue cependant une bonne base de travail. Il est consultable sur internet à l’adresse : www.fasp.info/incineration/
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