Dans l’après-midi de ce vendredi, le Rio Tagus (environ 900 tonnes de ferraille et des tonnes de moules de l’étang de Thau) touchera Brest après avoir galéré pendant 43 années en Méditerranée et en mer Noire.
Entre décembre 1999 et le 14 octobre 2010, le Rio Tagus, ex-Nadezhda, ex-Falcon, ex-Lady Aurora, ex-Falcon, ex-Lady Aurora, ex-Tifany, ex-Genca Sesto, ex-Wonder One, ex-Arago, ex-Ruca Challenge, ex-Argo Challenge), a été détenu dans les ports de Bourgas, Rijeka, Mykolaïv, Gibraltar, Casablanca, Ashdod, Izmit et Damiette. Les inspecteurs des Etats du port ont relevé régulièrement à bord du Rio Tagus des déficiences techniques et sociales majeures. Il était ciblé par les mémorandums de Paris, de la mer Noire et de la Méditerranée.
Cependant, la communauté portuaire et industrielle de Sète a accepté qu’il vienne de Damiette en Egypte avec une cargaison de 2500 tonnes d’engrais à base de nitrate d’ammonium (source : Mission nitrate d’ammonium mai 2021 p.51). La cargaison en état dégradé a été déchargée et le Rio Tagus a été immédiatement abandonné par son armateur avec 10 marins à bord (un Egyptien, 8 Ghanéens, un Ukrainien, source ITF).
Le port de Sète accumule les négligences et les excentricités en acceptant dans ses bassins des bétaillères sous-normes, des thoniers libyens et des navires sous-normes (Florenz, Star 1, Vasiliy Belokonenko, Edoil). L’un de ses derniers exploits est d’avoir organisé la fuite de l’Odeep One (cf. “Un navire poubelle se fait la malle à Sète“).
En 12 ans, le port de Sète puis la région Occitanie ont tout fait pour se débarrasser du Rio Tagus. Plusieurs ventes aux enchères ont été infructueuses. La dernière (3 octobre 2016) a abouti à la vente de l’épave pour 11.000 euros à un ferrailleur espagnol au sud de Barcelone. Grâce à l’intervention de Robin des Bois et à la vigilance de la DIRM (Direction Interrégionale de la Mer Méditerranée), une tentative de remorquage par le remorqueur espagnol Paris (OMI 8704004) a été déjouée le 6 avril 2018.
Le 12 février 2021, un appel d’offres a été lancé pour la démolition à Sète du Rio Tagus mais la région Occitanie, propriétaire de l’épave, n’a pas respecté les clauses de l’appel d’offres et a privilégié l’offre de Navaleo à Brest et le transfert du Rio Tagus à bord du Yacht Express. Une première tentative d’embarquement du Rio Tagus à bord du Yacht Express a échoué en juin 2021.
Robin des Bois est évidemment favorable à la déconstruction des navires en fin de vie sur la façade atlantique et a d’ailleurs contribué à ce que le chimiquier russe Varzuga qui, en provenance de Mourmansk, se dirigeait en remorque vers les chantiers de démolition d’Aliaga en Turquie soit finalement dérouté sur Brest en été 2021 et démantelé par Navaleo (cf. “La fin de vie du tanker russe aura lieu à Brest“).
Par contre, Robin des Bois déplore qu’il n’y ait pas de chantier de démolition agréé par l’Union européenne sur le littoral français et espagnol de la Méditerranée.
Dans la Méditerranée, dans la mer Noire et dans la mer d’Azov, sont exploités un grand nombre de navires qui auraient dû depuis plusieurs années être sortis d’exploitation. Les navires sous-normes sont hébergés par des pavillons sous-normes. Les administrations des pays hôtes (Tanzanie, Togo, Sierra Leone, Comores, Palaos, Bélize, Cameroun … ) sont incapables de vérifier la navigabilité des navires et de vérifier que les conditions de vie et de travail sont conformes aux conventions internationales.
En Méditerranée et dans les mers adjacentes, le manque de chantiers de démolition agréés en France, en Grèce, en Roumanie, en Bulgarie, favorise la poursuite d’exploitation de navires dangereux pour les équipages, pour la sécurité maritime et pour l’environnement.
En conséquence, en phase terminale, certains de ces navires font de la traite d’êtres humains (bétaillère Ezadeen pavillon Sierra Leone) ou du trafic de drogue (Nehir pavillon Palaos).
Rio Tagus, Sète, 14 juin 2022 © C.Nithart/Robin des Bois
Rio Tagus, Sète, 14 juin 2022 © C.Nithart/Robin des Bois
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