Lundi prochain s’ouvre à Shimonoseki la 54ème session plénière de la Commission Baleinière Internationale (CBI). Fidèle à son obsession et à sa nostalgie, le Japon y remet la pression et a dressé près de l’aquarium de la ville une statue de baleine bleue en hommage à la gent baleinière et à la manne alimentaire qu’elle offre à l’humanité. Il est estimé qu’en 1940 les baleines bleues étaient entre 300 000 et 350 000. En 2002, et malgré une interdiction de la chasse mise en oeuvre en 1967 sur l’océan mondial, les baleines bleues ne sont plus que 2000 à 3000. La statue de Shimonoseki résonne comme un mémorial. A force de finir dans les assiettes il y a un demi-siècle, les baleines bleues ne sont pas encore assurées d’échapper à l’extinction. Année après année, il se révèle pourtant grâce aux recherches et observations océanographiques que les baleines sont beaucoup plus utiles en mer qu’à table.
Dans la mer de Béring, les baleines grises qui se nourrissent d’organismes benthiques sur le plateau continental séparent la boue d’origine tellurique du sable marin. Cette opération mécanique de tri préserve l’habitat, disperse les nutriments et les petits crustacés, assure la gestion des fonds sous-marin et perpétue les chaînes alimentaires de l’océan arctique. Les baleines sont des agricultrices de la mer.
Il y a aussi une vie après la mort des baleines. L’équipe de l’université de Hawaï démontre depuis 1987 que les squelettes de baleines grises dans l’océan Pacifique et à plus de 1000 mètres de profondeur génèrent des colonies de bactéries, de crustacés, de mollusques. Ces communautés d’organismes primaires profitent des composés soufrés, du méthane et des lipides provenant de la lente décomposition des baleines pour se développer et se reproduire pendant plusieurs années. Ces écosystèmes spécifiques, comparables à ceux qui se regroupent autour des sources hydrothermales abyssales, pourraient s’épanouir sur et autour des dépouilles des baleines à bosse, des baleines franches, des rorquals communs, des baleines bleues et des cachalots. Ils constituent des foyers de dispersion à travers les océans d’organismes primaires servant de fondement à la biologie marine.
C’est pourquoi Robin des Bois souhaite que les contributions positives des baleines à l’équilibre biologique marin soient explorées et prises en compte au sein de la CBI.
Cette perspective est d’autant plus importante que le Japon accuse les 75 espèces de cétacés d’être les acteurs principaux de l’appauvrissement des ressources marines en consommant jusqu’à 400 000 tonnes par an de produits de la mer. Le Japon se sert de ces statistiques simplistes, très éloignées de la complexité de l’écologie marine, comme d’un argument de poids en faveur de la reprise de la chasse commerciale des baleines.
Une représentante de l’association Robin des Bois participe aux débats de la CBI en tant qu’observatrice. Elle sera disponible à partir du lundi 20 Mai pour délivrer des informations sur les autres gros enjeux évoqués dans la déclaration d’ouverture de Robin des Bois.
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