“A la Trace” n°33, le gorille règle ses comptes

13 juil. 2022

“A la Trace” n°33,
le bulletin de la défaunation
(pdf, 287 pages – 10,4 Mo)

Photo Parc National des Virunga.
https://virunga.org/fr/support-us/donate/

En tant que gorille des montagnes vice-président par intérim de la section cruauté et contrebande de la Cour des comptes et des règlements, j’ai la responsabilité de présenter le n°33 d'”A la Trace”, 287 pages, 1759 événements survenus entre le 1er mai et le 31 août 2021 avec des extensions en fin d’année et en 2022, 590 photos et cartes.

Une fois de plus, je constate l’iniquité. Un de mes frères lions mange 7 kg de bidoche par jour à Bangkok et un autre frère lion crève de faim à Sanaa au Yémen. Nos lions sont au plus mal, 3 tonnes d’os soit 345 squelettes ont été saisies au Vietnam dans un conteneur de mer.

Nos sœurs poissons ne sont pas mieux loties, en particulier chez les esturgeons. Les petits œufs qu’elles portent pour perpétuer les espèces et peupler les fleuves sont transformés en une friandise salée que nos bourreaux appellent khaviar. C’est un des domaines que les hommes russes et ukrainiens continuent à cultiver en commun.

Nos requins en tous lieux de la mer et de toutes espèces sont sortis des eaux et amputés des ailerons (plus de 8280 kg dans ce numéro). Plusieurs des 8 milliards d’humains disent que les manger, c’est bon pour la reproduction.

Nos lumineux aras sont mis en difficulté au Brésil par un épicier français du nom d’Auchan qui s’est mis à vendre du vent sous le nom de Voltalia.

Nos crocodiles ont eux aussi payé un lourd tribut à la grivoiserie humaine et plusieurs d’entre eux complètement méconnaissables ont été convertis en sièges d’une voiture nommée Rolls-Royce Phantom.

Rolls-Royce Phantom saisie en Italie (p.210) © ADM

Je déplore au nom de tous mes collègues que sur la Terre entière, l’homme et la femme nous tuent avec du carbofuran et d’autres toxiques. Il y a 31 empoisonnements dans l’ouvrage n°33 et le record de concentration de carbofuran dans les appâts atteint 6 grammes/kg ! C’est en Hongrie.

Les trafiquants ont semble-t-il à moins que ce soit du fo trouvé un nouvel eldorado avec l’ambre gris de nos chers cachalots. 256,5 kg dans ce numéro au prix moyen de 127.500 €/kg.

De concert avec l’empoisonnement monte en puissance un nouveau fléau. Les clôtures électriques tuent nos félins volontairement et nos éléphants. Il y a au moins 26 occurrences dans l’ouvrage.

Le déstockage post-Covid d’écailles de pangolin et de pangolins congelés atteint des sommets en quantité et en cherté. Une écaille se vend au détail 1 US$ en République Démocratique du Congo et plus de 40 en Chine, et en gros plus de 9000 US$/kg. A la bourse faunique de Hong Kong, tous les trafiquants misent sur l’écaille tandis que la cote de la corne se stabilise autour de 40.000 US$/kg. J’ai noté à ce sujet à la page 70 qu’un bateau poubelle a fait exprès le voyage de Wenzhou (province du Zhejiang, Chine) au Mozambique, avec retour à Xiamen (province du Fujian), pour ramener exclusivement 145 cornes (250 kg) de nos frères les rhinocéros.

Il m’est aussi pénible de constater depuis janvier 2020, des milliers et des milliers de gazelles, de girafes et de girafons, de zèbres et de zébreaux et d’autres soldats inconnus des savanes, des forêts et des marais sont tombés dans les embuscades des pièges pour être bouffés par les humains. Pour des raisons diverses qui méritent analyse, la frousse du Covid a dopé la viande de brousse.

Un zèbre blessé par un piège au Zimbabwe (p.122)
© Victoria Falls Wildlife Trust

Enfin, vu mon état et ma position, j’ai été spécialement ému fort par le sort infligé à “Tarzan”, un frère chimpanzé qui a vécu toutes ses années dans un garage et qui a été honteusement exploité. C’est un contentement personnel de le savoir à ce jour transféré à la lumière du jour dans un sanctuaire où il mange des fruits et côtoie des congénères et des humains solidaires, un contentement certes, avec quelques autres, mais qui ne masque pas les inquiétudes et l’indignation issues de ce rapport n°33.

“Tarzan” (p.132)
© Conserv Congo

 

 

 

 

Imprimer cet article Imprimer cet article