Captain Tsarev : Panama Papers à Brest

15 avril 2016

Le Captain Tsarev rouille depuis 7 ans et demi dans le bassin n°5 du port de commerce de Brest. Construit en 1982 à Lübeck (Allemagne), 153,60 m de longueur, le cargo victime d’une panne de propulsion était arrivé en remorque en novembre 2008. Il n’est jamais reparti. L’équipage n’était pas payé, 15 des 24 marins russes et ukrainiens ont été débarqués en février 2009, les autres sont restés à bord jusqu’en septembre 2009. Le Captain Tsarev a été visité, pillé, squatté, et victime d’un incendie en septembre 2014. Son armateur russe domicilié au Pirée (Grèce) ne donne plus signe de vie. Le cargo est une poubelle. Il contient 4 à 500 t d’eaux d’extinction de l’incendie, 5 à 600 t de fioul et de l’amiante. Il bat pavillon du Panama.

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© Laurent Mignaux/MEDDE

 

L’armateur a été déchu de sa propriété le 9 décembre 2015. La Région Bretagne, autorité concédante du port de Brest, est autorisée à vendre le navire. Un appel d’offres a été lancé le 15 mars, avec échéance le 7 avril 18h « heure de Brest ». Le cahier des charges contient une clause sur la date limite de départ du Captain Tsarev. Il devra avoir quitté le bassin le 31 mai, la ville a besoin des quais pour accueillir les Fêtes Maritimes Internationales Brest 2016 du 13 au 19 juillet 2016.

L’appel d’offres exige que le chantier de démantèlement soit approuvé par l’Etat français. En France, seuls Veolia à Bassens et Gardet & de Bezenac au Havre auraient les capacités administratives et logistiques imposées par la longueur et la taille du Captain Tsarev. Cependant selon nos informations, les responsables d’un chantier turc ont examiné le navire quelques jours avant la clôture de l’appel d’offres.

La démolition des navires en panne, saisis ou arraisonnés qui gisent dans le port de Brest est toujours différée et délocalisée sauf nécessité. Ce fut le cas pour l’intransportable Winner, construit en 1970, 101 m de longueur, arraisonné pour trafic de cocaïne en 2002, démoli par l’entreprise Le Gall entre novembre 2010 et mars 2011 dans le bassin n°4 du port militaire.

Un projet de multi activités présenté par les Recycleurs Bretons, comprenant entre autres le démantèlement des navires, a fait l’objet d’une enquête publique entre le 4 janvier et le 4 février 2016. Le commissaire enquêteur a émis un avis favorable mais l’autorisation d’exploiter n’est pas encore signée par le préfet du Finistère. Il est donc improbable que les Recycleurs Bretons puissent être retenus pour le démantèlement du navire. Par ailleurs, à la lecture attentive du dossier, il s’avère que les principales activités envisagées par les Recycleurs Bretons sur la plate forme du 5ème bassin quai est du port de Brest – là-même où le Captain Tsarev est pour le moment amarré – sont le stockage de déchets pulvérulents (Combustible Solide de Récupération, CSR), le broyage et le stockage de déchets de bois. Selon le dossier d’enquête publique, les expéditions maritimes de CSR concerneraient 3 navires par an, et les expéditions de bois 6 navires par an. Ces 2 activités sont susceptibles de dégrader l’eau de la rade et de nuire à la qualité sanitaire de la faune benthique notamment des coquilles Saint-Jacques par l’émission de poussières et le rejet des eaux pluviales toxiques. Robin des Bois n’est pas favorable à l’installation de ces activités porteuses de risques divers sur le port de Brest. Le légitime démantèlement des navires ne saurait servir de couverture à des trafics polluants et relevant de la convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination.

Brest a d’autres atouts pour se développer que l’exportation des déchets. Il y a assez de cales sèches dans les 2 ports civil et militaire pour y faire prospérer dans la sécurité environnementale et sanitaire la déconstruction et le recyclage des navires.

 

 

 

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