Monsieur Bricolage en Baie de Seine

2 nov. 2023

Du jamais vu, plus de 80 navires de commerce dont une douzaine de pétroliers et chimiquiers et une quinzaine de porte-conteneurs se sont abrités dans la nuit du mercredi 1er au jeudi 2 novembre 2023 en baie de Seine dans la zone refuge dite de Tatihou ou de Saint-Vaast-la-Hougue connue par les armateurs et les commandants du monde entier. Ils étaient déjà une quarantaine de navires mercredi à 14h.

Plus de 1000 marins de toutes nationalités ont bénéficié de ce havre d’accalmie. 17 pavillons internationaux étaient représentés. La plupart des navires étaient au mouillage, quelques-uns étaient en dérive contrôlée à proximité immédiate de l’usine offshore en projet et en début de construction.

En 2015, l’annexe 22 du dossier d’enquête publique du parc éolien offshore de Courseulles-sur-Mer–Port-en-Bessin disait qu’en théorie, la zone refuge comporte 60 positions de mouillage, qu’en pratique elle était utilisée par un ou deux cargos, quelques soient les conditions météorologiques et que ce chiffre s’accroît par forts coups de vent d’ouest pouvant alors atteindre la douzaine.

Ces déclarations fallacieuses ont été reprises en 2017 par les services de l’Etat et Eoliennes offshore du Calvados, filiale d’EDF Energies Nouvelles dans le cadre du recours déposé par huit associations dont Robin des Bois devant le tribunal administratif de Nantes. Il s’avère qu’en fait la zone refuge de la baie de Seine est couramment utilisée en cas d’avis de tempête par une quarantaine de navires marchands selon les relevés antérieurs de Robin des Bois. Mais c’est la première fois, à l’occasion de l’avis de tempête Ciaran, que Robin des Bois constate une telle fréquentation de la zone refuge.

Robin des Bois salue le principe de précaution mis en œuvre par les armateurs et leurs équipages. Cette posture de prudence a évité des avaries, des naufrages, des pertes de cargaison dont des conteneurs.

Selon le mémoire en défense n°2 d’EDF Energies Nouvelles, “l’hypothèse exceptionnelle d’un déradage (dérive incontrôlée) d’un navire au mouillage vers les installations du parc éolien offshore fera l’objet de procédures d’urgence définies par la préfecture maritime de la Manche et de la mer du Nord basée à Cherbourg”. Six ans après, alors que les travaux ont commencé, ces procédures d’urgence ne sont toujours pas connues. Le mémoire en défense dit bien qu’en cas de nécessité, le remorqueur d’Intervention, d’Assistance et de Sauvetage, l’Abeille Liberté, interviendra rapidement en baie de Seine. En vérité, l’Abeille Liberté était dès mercredi matin prépositionnée à la demande du préfet maritime au large de la presqu’île de La Hague pour, si nécessaire, porter secours à un navire en difficulté dans le rail de la Manche. L’Abeille est magique mais elle n’a pas le don d’ubiquité.

Il est carrément absurde d’avoir décidé de construire une usine éolienne offshore dans une baie refuge connue et appréciée des navigants du monde entier pour la relative accalmie des vents.

Robin des Bois souhaite que ce projet éolien offshore soit abandonné et qu’au vu de la violence et de la fréquence des avis de tempêtes extrêmes en mer du Nord, dans la Manche et dans le golfe de Gascogne, cette zone refuge soit agrandie et sanctuarisée pour permettre aux navires montant et aux navires descendant de se mettre à l’abri.

Le chimiquier Bow Fagus fait partie des réfugiés.
Photo d’illustration prise le 30 juillet 2022 à Wilmington en Caroline du Nord

A lire: L’horizon est notre avenir, ne le gaspillons pas !, 12 février 2022.

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