mis à jour le 18 novembre 2024
La préfecture, le rectorat, l’Agence Régionale de Santé (ARS), la mairie, la Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (DREAL) sont unanimes : des enfants ont la nausée, ont mal à la tête, ont la boule au ventre, ont la gorge qui gratte et les yeux irrités, ce n’est pas grave, c’est rien, ça passera. Ça fait en quelque sorte partie du bizutage de la vie d’aujourd’hui et de demain.
Pelleteuse et amiante, le samedi 9 novembre 2024. DR
Phase 1
Depuis le début des excavations des terres noires de l’ex-usine à gaz de La Rochelle –un siècle de distillation du charbon et de sous-production et d’épandage de goudron et de cyanure–, les enfants souffrent, les parents s’inquiètent des odeurs qui vont, qui viennent, qui repartent et reviennent au gré des vents, des sous-vents, des contre-vents. Les miasmes maraudent, vecteurs de polluants chimiques indisposants, cancérogènes pour certains, probablement pour d’autres, reprotoxiques et mutagènes. C’est la loterie d’Eole. Le désamiantage du bâtiment ancien à reconvertir en résidence étudiante s’est lui aussi fait dans des conditions discutables.
Le promoteur Speed Rehab (Brownfields et Vinci) est pressé et peu lui importe que les enfants et les enseignants du groupe scolaire Fénelon et de l’école élémentaire Massiou de l’autre côté du mur du cloaque soient oppressés. Après le premier et prémonitoire communiqué de Robin des Bois du 2 février 2024, Speed Rehab disait dans le journal Sud Ouest que “les terrassements très ponctuels seraient faits quasiment à la petite cuillère” et que les dégazages dans l’air seraient évités. En fait de petite cuillère, Speed Rehab et ses sous-traitants travaillent à la pelleteuse, et en fait de dégazage, ils prennent l’air ambiant pour une poubelle. Sur cette lancée, la “dépollution” telle qu’elle est planifiée devrait être terminée à la fin de l’année 2024.
Phase 2
Les désagréments, les ennuis de santé, les pertes d’aménités reprendront avec des pauses et des pics pendant les fondations et les constructions des maisons de plain-pied et des bâtiments sur niveau de sous-sol. Les usines à gaz sont malheureusement connues pour receler dans leurs dessous des mares de pollutions et des déblais non décelés en phase préliminaire. La remobilisation des polluants pendant les vacances d’été et les vagues de chaleur de 2025 ne manquera pas de nuire à nouveau sans modération à la santé des avoisinants les plus fragiles que sont les nourrissons, les enfants, les femmes enceintes et en âge de procréer, les personnes atteintes de pathologies respiratoires antérieures à cette agression en bande organisée.
Phase 3
L’arrêté préfectoral du 2 mai 2024 fixe comme objectifs de réhabilitation pour le milieu sol 500 mg/kg pour les HAP (Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques), 800 mg/kg pour les HCT (HydroCarbures Totaux) C10-C40, 400 mg/kg pour les cyanures totaux et 150 mg/kg pour le naphtalène. En termes clairs, ça veut dire que resteront sur place des terres (méritent-elles encore le nom de terres ?) pouvant contenir par kilo quasiment 2 grammes de poison.
En conséquence, l’arrêté préfectoral interdit sur l’ensemble du périmètre sinistré et bâti (soit un peu plus d’un hectare) les jardins potagers, la plantation en pleine terre d’arbres fruitiers et de haies à baies, l’utilisation des eaux souterraines, et impose la mise en place de canalisations en matériaux non poreux et non perméables pour l’amenée d’eau potable. La ventilation minimale permanente permettant d’assurer un renouvellement d’air devra être de 0,3 volume par heure pour les locaux résidentiels et de 3 volumes par heure dans les parkings au niveau des sous-sols.
Le pire du pire, et du jamais vu, parmi ces restrictions d’usage et ces contraintes techniques, c’est que les usagers des 152 logements au sein de la résidence étudiante accueillie dans un ex-bâtiment administratif construit par Gaz de France après la fin d’exploitation de l’usine à gaz (1946-1961) et repris par Enedis ne pourront pas occuper les lieux plus de cinq ans pour éviter d’être exposés à de graves problèmes de santé (sauf si “l’Analyse des Risques Résiduels post-travaux démontre la compatibilité pour un usage résidentiel classique sur des temps d’expositions identiques aux autres bâtiments résidentiels”). L’arrêté préfectoral n’interdit pas encore aux occupants d’avoir des bébés et des enfants !
Phase 4
La Société Civile de Construction-Vente (SCCV) La Rochelle Marcel Paul dont les actionnaires uniques sont Brownfields et Vinci présente déjà sous une forme idyllique (“8 minutes à pied du centre-ville et 13 minutes à pied du Vieux Port”) ce programme immobilier judicieusement dénommé “L’Envolée”. Sur plan, les appartements 2 pièces se vendent entre 261.100 et 298.400€, les appartements 4 pièces entre 456.000 et 492.000€, la maison 4 pièces 600.000€. La livraison est prévue pour le 2ème trimestre 2027. Les logements studios T1 de la résidence dite étudiante sont proposés à partir de 127.500€. “Idéal investisseurs : rentabilité optimisée, gestion facilitée et fiscalité avantageuse, en toute liberté sans bail commercial.”
Robin des Bois recommande la suspension des travaux, l’installation d’une tente de confinement sur l’emprise de l’ancienne usine à gaz et le réexamen de tous les paramètres de la dépollution afin de garantir la sécurité sanitaire aux enfants, aux personnels scolaire et périscolaire, aux riverains et aux futurs usagers du site.
Message envoyé le 18 novembre 2024 par l’ARS Charente Maritime aux parents d’enfants malades pendant le chantier de dépollution de l’ex-usine à gaz de La Rochelle :
A lire sur le même sujet:
Travaux de dépollution du site de l’ancienne usine à gaz – La Rochelle, lettre ouverte du 5 novembre 2024
Les gazofolies de La Rochelle, communiqué du 2 février 2024
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