SOS Gatteville
Demain mardi, le Gatteville devrait subir une visite-bidon du représentant d’une société de classification exotique spécialisée dans les objets flottants qui ne sont plus tout à fait des navires. Construit il y a plus de trente ans, et donc dépourvu de tout titre de navigation – sa classe lui a été retirée par le bureau Véritas en Septembre 2001. Le Gatteville pourrait retrouver la capacité de renaviguer pour un ou quelques voyages grâce à la complaisance de la société de classification qui dépêchera demain à Cherbourg un de ses experts étrangers.
Ça vogue de mal en pis
Le Khalifeh I hors d’âge avec sa passerelle et sa timonerie en bois, ses marins syriens, son pavillon des Iles Tonga et 274 moutons considérés comme irréguliers par la Direction des Services Vétérinaires de Rouen a quitté le port du Tréport ce matin à 11h15 en direction de Waterford en Irlande.
Bateau, équipage et marchandises sur pied affrontent le gros temps de la Manche et de la Mer du Nord. Navire qui devrait être hyper-ciblé par les inspecteurs européens de la sécurité maritime, le Khalifeh I a toujours travaillé en Méditérranée où il a d’ailleurs été responsable d’un dégazage en Mars 2001. Sa conception des années 50, indépendamment des conditions d’entretien, font du Khalifeh I un bateau structurellement dangereux et polluant. Son propriétaire actuel est mal identifié. Il s’agirait d’un marchand de bestiaux irlandais associé à des maquignons polonais.
67 naufragés sur les quais
Certains cargos ne sont pas seulement en mauvais état, couleur fleur de rouille ou cache-misère. Ils sont aussi le lieu de travail et le domicile de travailleurs expatriés, tenus en laisse faute d’argent et de visas.
Ces gens du voyage, nouveaux exclus, sont coincés sur les quais et dépendent pour leur survie des bonnes volontés locales qui n’ont pas toujours les moyens d’accomplir leur mission dans la continuité. Au fil des semaines et des mois, quand la routine s’installe, l’isolement des hommes s’aggrave et aussi leur difficulté à vivre ensemble, sur un lieu unique, mal entretenu, une sorte de prison à quai où des hommes de cultures, de religions, et d’horizons divers sont condamnés à vivre dans l’oubli et parfois le conflit.
Un navire sous-normes à Lorient
Arrivé hier à l’aube à Lorient, avec un départ prévu pour demain, le navire russe Valday, présente tous les signes cliniques du navire à considérer comme prioritaire pour une inspection par les autorités du port dans le cadre de l’entente européenne dite du Mémorandum de Paris. Ce Mémorandum signé en 1982 regroupe les pays européens représentés sur les façades atlantique et méditerranéenne, plus le Canada, la Croatie, la Fédération de Russie et l’Islande. Elle incite les inspecteurs de sécurité maritime à visiter 25% des navires étrangers touchant les ports, et à échanger des informations relatives à l’état du navire, aux conditions d’habitation, d’hygiène et de vie des équipages. Dans certains cas, les navires visités peuvent être retenus plusieurs jours à quai en attendant les réparations ou les aménagements, ou peuvent être théoriquement contraints de rejoindre un chantier naval désigné, parfois pour destruction.
Un capitaine-émissaire
Alors que les responsables du shipping trading de TotalFina et le directeur du port de Saint-Nazaire sont libres de leurs mouvements, la justice française a trouvé son bouc-émissaire: un capitaine de nationalité indienne.
C’est pourtant toute l’organisation française du trafic maritime qui est en cause. Le 4 novembre 1999, dans le cadre des journées d’information du Cèdre, le chef du bureau environnement de la préfecture maritime de Brest s’inquiétait de la multiplication des cargos sous-normes et de la tendance des ports de commerce de toute la façade atlantique à refuser l’accès aux bateaux en difficulté et à jouer au ping-pong avec des équipages en danger.