La Chasse à l’Onyx (4)
Prayati Shipping PVT, basé à Bombay, propriétaire du car ferry Onyx confirme sa vocation d’armateur démolisseur. La seule destination des navires de sa « flotte » semble bien être les chantiers asiatiques de démolition.
Repéré pour avoir vendu le vieux tanker President à un chantier du Bangladesh en été 2009, quelques mois après l’avoir racheté, Prayati Shipping PVT était aussi devenu à la même époque propriétaire du Rose S, un vraquier construit en 1976 (voir “La chasse à l’Onyx“, 4 février 2010). Aujourd’hui, « l’armateur » de l’Onyx vient de se séparer de ce navire détenu dans tous les ports du monde et qui n’a plus navigué depuis son rachat : le Rose S vient d’être échoué pour démolition à Alang.
La chasse à l’Onyx (bis)
Dans un courrier adressé à Robin des Bois en date du 3 février, le vice-amiral d’escadre de la préfecture maritime de l’Atlantique subordonne le départ du vieux car-ferry Onyx à l’existence d’une fenêtre météorologique compatible «afin de garantir la sécurité des membres d’équipage et du navire». Il semble que cette fenêtre se soit ouverte ce matin vers 10h00, heure de l’appareillage de l’Onyx. De plus, le courrier mentionne que la décision de levée de détention de l’Onyx sera prise « dans le cadre d’une traversée vers un port de réparation ». Brest a donc été seulement un port de bricolage et de dépannage sommaire.
La chasse à l’Onyx
L’Onyx est un car ferry usé par plus de 30 ans de service en Scandinavie. Il a été considéré comme un déchet par l’agence finlandaise de l’Environnement mais, comme tout déchet est valorisable selon le dogme du Développement Durable, il a été racheté par un armateur indien, Prayati Shipping PVT. Celui-ci prétend dans un premier temps que l’ex-Casino Express servira de transporteur de voitures au Moyen-Orient puis dans un deuxième temps qu’il subira des transformations en Turquie en vue de la poursuite d’exploitation.
Un ex cargo nucléaire part à la casse à Alang
Sans tambour et sans trompette, l’Allemagne, pionnière en Europe de l’application de l’énergie atomique à la propulsion des navires, a laissé partir à la démolition manuelle dans la baie d’Alang en Inde son ex-Otto Hahn mis en exploitation en 1967. Symbole de l’échec de la première vague de navires marchands à propulsion nucléaire, l’Otto Hahn a été reconverti en cargo conventionnel en 1980. Le réacteur nucléaire de 38 MW a été enlevé, mais il est légitime de suspecter après treize ans d’exploitation que des éléments internes de la structure de l’ex-Otto Hahn aient été contaminés ou irradiés par des rejets ou des rayonnements non maîtrisés. Le navire a été victime d’un accident nucléaire majeur en août 1973 quand deux assemblages combustibles du réacteur se sont fissurés.
Fin de l’Histoire pour le dernier trois-mâts nantais
L’ex-Oiseau des Iles construit par Dubigeon en 1935 a été envoyé à la casse après plusieurs années d’abandon à Trinidad dans les Caraïbes.L’histoire mouvementée et valeureuse de ce fleuron de la construction navale va de l’estuaire aux Antilles en passant par le Pacifique Sud, la Polynésie et la côte Ouest du Mexique.
Bilan mondial 2009 des navires partis à la démolition : Le cap des mille navires est franchi
Depuis quatre ans, Robin des Bois étudie le marché de la démolition des navires grâce à la mobilisation et l’analyse d’une trentaine de sources bibliographiques. Robin des Bois a comptabilisé 293 navires vendus pour la démolition en 2006, 288 en 2007 et 456 en 2008. En 2009, 1006 navires sont sortis de flotte, soit plus de deux fois le volume de 2008 et trois fois celui de 2006. Le poids total de métaux recyclés atteint plus de 8,2 millions de tonnes, cinq fois le tonnage de 2006.
Durant cette année des records, le rythme des navires quittant les océans s’est à peine ralenti pendant les mois d’été. La crise financière mondiale a lourdement pesé sur les échanges commerciaux ; les grands armements ont massivement envoyé à la casse les navires les plus anciens pour s’adapter à la chute des taux de fret et rentabiliser leurs navires récents. En fin d’année, les porte-conteneurs inactifs et en attente d’ordres étaient encore près de 700. Les associations d’armateurs estiment souhaitable d’éliminer 25% de la flotte mondiale. En dépit de l’explosion du nombre de navires proposés à la démolition, les tarifs des chantiers asiatiques ont sensiblement progressé, passant de 200 $ la tonne en début d’année à près de 300 $ en décembre.
Le Clem recule à Hartlepool
Les premières opérations de déchiquetage après dépollution de la coque Q 790 ont commencé dans les chantiers Able au nord-est de l’Angleterre. Le découpage du nez du porte-avions réalisé entre le 16 et le 22 novembre aboutit à une certitude : la coque Q 790 ne pourra plus être remorquée.
La première visite de Robin des Bois, conforme à une demande formulée à la CLI de Brest le 3 décembre 2008, s’est déroulée le 25 novembre 2009. Les autres associations membres de la CLI ont décliné l’invitation. La représentante de Robin des Bois a constaté les éléments suivants :
Onyx : Note d’information
Le car ferry Onyx, ex-C Express, ex-Casino Express, ex-Fennia a failli couler dans la Manche si l’Abeille Bourbon n’était intervenue pour sauver les 26 marins de l’équipage et le remorquer vers Brest le 23 novembre.
L’Onyx construit en 1966 en Suède était officiellement destiné à la démolition selon la banque de données Equasis. Sa société de classification Lloyd’s Register of Shipping lui a retiré ses certificats. Il bat pavillon Saint-Kitts-et-Nevis, un des pavillons du dernier voyage utilisé pour des raisons d’économie par les propriétaires.
Bulletin « A la Casse » n°17
En février 2009, « en raison d’une visibilité réduite due au brouillard » le chimiquier Kashmir chargé de 30.000 t de condensats destinés à la fabrication des matières plastiques entre en collision avec le porte-conteneurs Sima Saman à 13 km au large de Dubaï. L’incendie qui se déclare ne sera maîtrisé que dans la soirée. Une colonne de fumée noire recouvre toute la journée la zone industrielle et le port de Jebel Ali, au sud de la ville de Dubaï. Après cinq mois d’attente, le Kashmir est vendu et remorqué pour démolition en Inde. Suies, liquides résiduels, matériaux fondus, amiante et PCB libérés, dioxines : les conditions de démantèlement des navires accidentés sont particulièrement dangereuses pour les travailleurs manuels.
Bulletin « A la Casse » n°16
La honte subsiste mais la scène du crime a disparu.
En octobre 1992, le Renata alors MC Ruby est la propriété de la société MC Shipping, une filiale du groupe monégasque Vlasov ; le gestionnaire du navire est V Ships, une autre filiale du groupe. Le navire charge au Ghana du cacao à destination du Havre, Amsterdam et Hambourg. Durant le voyage, neuf passagers clandestins sont découverts, dépouillés de leur argent et séquestrés dans le peak avant ; ils sont ensuite sortis de nuit sur le pont puis assommés et jetés à l’eau en pleine mer entre Takoradi et Le Havre. Le seul rescapé donnera l’alerte au Havre.Le 9 décembre 1995, à l’issue d’un procès de quatre semaines, le commandant et son second sont condamnés à la réclusion à perpétuité et trois autres membres de l’équipage ukrainien à 20 ans de détention. Ni le groupe Vlasov, ni ses filiales MC Shipping et V. Ships n’ont été condamnés, en dépit des conditions dégradées imposées à l’équipage et des nombreux trafics annexes mis en évidence sur le navire et connus de tous. Le lien substantiel entre les gestionnaires du MC Ruby et l’équipage n’a pas été retenu. Voir « Coke en stock », La Flèche, hiver 1996 et « Le désert des Barbares » communiqué de Robin des Bois, 9 décembre 1995.